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Bienvenue chez Sab
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20 septembre 2012

Tantale

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Ah que coucou !

 

 

 

Pour ceux et celles qui ont un trou de mémoire et ont oublié ce mythe grec, le voici narré par Eduard Petiška.

 

Il y a des siècles, le roi Tantale régnait sur la Lydie, pays qui fait partie aujourd’hui de la Turquie. Nul n’était plus riche que lui. La montagne du Sipyle lui donnait de l’or, ses champs s’étendaient à perte de vue et les épis de blé qui y poussaient étaient deux fois plus lourds que n’importe où ailleurs. Sur les flancs verdoyants des collines, les bouviers gardaient d’énormes troupeaux. Les dieux eux-mêmes couvraient Tantale de leurs faveurs. Ils lui permirent de participer à leurs festins à l’Olympe et d’écouter leurs discours.

Pourtant Tantale n’était qu’un mortel. Comme pour les autres humains, le fil de sa vie avait été filé par la Moire Clotho. Il était dévidé par la seconde Moire, Lachésis, et la troisième, Atropos, allait le couper. Mais Tantale ne pensait pas à la mort.

« J’assiste aux banquets des dieux », se disait-il, « et il n’y a aucune différence entre eux et moi. Ils emplissent ma coupe avec le nectar divin, je partage avec eux l’ambroisie sacrée et je sais de quoi ils parlent. Personne ne peut penser que je ne suis pas un des leurs, moi aussi. »

« Mais tu ne sais pas tout, » lui répondait sa conscience.

« C’est vrai, » admettait le roi, « mais les dieux eux-mêmes sont-ils omniscients ? Je vais les mettre à l’épreuve ».

Un jour, un audacieux vola dans le temple de Zeus, en Crète, un précieux chien en or. Sachant que Tantale ne craignait pas les dieux, il le lui apporta pour qu’il le dissimulât. Peu après, un prêtre visiblement indigné se présenta aux portes du palais.

« O roi, » lui dit-il, « l’usage ne veut pas que les gouvernants s’associent avec les voleurs. Rends au temple ce qui ne t’appartient pas ».

« Je ne sais pas de quoi tu parles, » lui fut-il répondu.

« Tu peux cacher un objet volé », poursuivit le saint homme dont les yeux flamboyaient, « mais tu ne pourras te dérober à la colère divine ».

« Si j’ai fait quelque chose de mal », sourit le coupable, « l’Olympe qui sait tout, l’aurait déjà appris et m’aurait puni. »

Le roi jura donc qu’il n’avait pas la statuette en or et le prêtre, désappointé, repartit.

Tantale était sûr que les dieux faisaient semblant d’être omniscients mais qu’ils ne l’étaient pas plus que les mortels.

En fait, chacun des actes de Tantale était connu au ciel, mais une chance était laissée au roi félon de choisir la vérité plutôt que le mensonge, l’honnêteté plutôt que le vol et la justice plutôt que le mal.

Aussi l’arrogance de Tantale ne fit que croître.

Le nectar et l’ambroisie ne lui suffirent plus : il se mit à dérober à la table des dieux du breuvage divin et de la nourriture pour les rapporter sur terre. Ses forfaits étaient de constantes injures aux lois célestes et humaines. Un jour, il imagina un crime terrible.

Ayant assassiné son fils Pélops, il convia les dieux à un banquet où il leur offrit de se nourrir de la dépouille de son fils. La déesse des cultures, Déméter, perdue dans ses pensées, mangea un morceau de la viande présentée, mais les autres dieux, saisis d’horreur, se levèrent précipitamment de table.

Tantale s’effraya, il comprit alors la puissance des dieux et se prosterna devant eux en implorant leur pardon. Mais la mesure était comble. Zeus, divinité suprême, envoya sans hésitation le traître dans les ténèbres du monde inférieur, dans le Tartare. Pour le punir de toutes ses mauvaises actions, il fut condamné à la souffrance perpétuelle.

Depuis ce jour au royaume des morts, Tantale doit se baigner dans une eau limpide et fraîche, tourmenté par une soif cruelle. Chaque fois qu’il se penche pour tremper ses lèvres sèches et gercées, l’eau s’échappe de ses mains et il ne retient que le sable.

Des fruits savoureux poussent à sa portée, mais Tantale ne peut apaiser sa faim : dès qu’il touche une poire, une figue ou une pomme, le vent se lève soudain et l’objet de sa convoitise s’envole. Au-dessus de sa tête se tient en équilibre un énorme rocher qui menace de tomber à tout moment. Une angoisse mortelle étreint sans cesse sa gorge.

C’est ainsi que le roi félon, subit parmi les ombres une triple torture.

Quant aux restes du fils de Tantale, Pélops, ils furent rassemblés par les dieux dans une marmite. Clotho retira du chaudron le jeune homme plus beau que jamais et lui rendit la vie. Seul manquait un petit morceau de son omoplate, mangé par la distraite Déméter.

Les dieux le remplacèrent par un morceau d’ivoire et depuis lors tous les descendants de Pélops ont une tache blanche sur l’épaule.

 

Chaque mythe contient une morale qui doit guider le peuple à se comporter telle que la morale de l’époque l’exigeait. Nous avons donc là encore une morale et un enseignement philosophico-religieux.

 

En effet les grecs voient là que personne, même un roi, ne peut se moquer indéfiniment et impunément des dieux. Ce n’est pas parce que personne ne dit quoi que ce soit, qu’il faut en profiter et abuser de la situation. Ce mythe encourage chaque individu à choisir la Vérité aux Mensonges, à choisir l’Honnêteté aux Vols, à choisir la Justice au Mal. Il enseigne donc que chacun d’entre nous doit choisir la route du Bien sous peine des pires châtiments car, qu’y a-t-il de pire de mourir de soif et de faim dans une région dont les cultures et la source sont abondantes ?

 

Ce mythe enseigne aussi qu’il ne faut pas se moquer des dieux, réfuter leurs existences, même si nous avons l’impression que Dieu n’existe pas, car :

 

« les desseins de dieu sont impénétrables »

 

encore aujourd’hui ;)… et qu’il a certainement une raison de nous laisser agir ainsi ou de laisser agir d’autres personnes comme elles le font et ceci malgré que nous ne pouvons pas encore en comprendre tous les aboutissants… Regardez dans ce dernier mythe ! les dieux ne voulaient donner à Tantale qu’une seconde chance de se comporter correctement et de corriger ses erreurs…

 

Bisous,

@+

Sab

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19 septembre 2012

Incas : Histoire d’un empire, 3ième partie

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Ah que coucou !

 

Comme promis hier (pour accéder au billet présentant la famille royale et la noblesse, cliquez ici), voici le second volet de la population de l’empire des Incas consacré aux paysans, mais comme je risquerais de faire quelques erreurs parce que je maîtrise mal cette société, je préfère recopier ci-dessous ce que nous enseigne Jean-Christian Spahni dans son ouvrage Les Indiens de la Cordillère des Andes, chapitre deuxième.

 

 

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La Paysannerie et le Travail des Champs

 

La civilisation inca repose essentiellement sur l’agriculture et la grosse masse du peuple est formée de paysans. La puissance de l’Inca est basée sur le travail en commun et l’union des populations, bien que l’empire soit une mosaïque de tribus très différentes les unes des autres.

Les paysans vivent en petites communautés auxquelles on a donné le nom quichua d’ayllu.

Une famille composant un ayllu ont un ancêtre, les markayoc, et se disent de même sang. Celui-ci peut être un animal, une plante, un rocher de forme étrange, une grotte, un lac, le sommet d’une montagne.

Tous les mariages se font à l’intérieur de l’ayllu, d’où le caractère de lignage de ce dernier auquel, par surcroit, la possession d’un territoire, la marca, confère un haut degré de cohésion.

La marca est divisée en topus, qui sont autant de parcelles appartenant aux chefs de familles, les purej. Les dimensions de chacune d’elles dépendent du genre de culture, de l’irrigation et du nombre des membres qui composent les familles. Nous savons qu’un tiers des terres revient aux paysans, alors que les deux autres sont répartis entre l’Inca et le clergé.

Chaque ayllu est indépendant et obéit à un système d’organisation à la tête duquel se trouvent les chefs de famille.

La terre se transmet par héritage ou par redistribution périodique selon les besoins de chaque groupe familial. Les membres d’un ayllu qui, pour une raison ou pour une autre, sont obligés de s’absenter – par exemple les soldats contraints d’aller à la guerre – ne perdent pas leurs droits. Leurs terres sont cultivées par les autres membres de la collectivité.

Il y a des terrains qui appartiennent à tout le monde et qui servent principalement de pâturages.

La communauté dispose encore de terres en friche qui sont distribuées aux nouvelles familles. Ainsi, personne ne souffre ni de faim ni de chômage.

 

 

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Terrains de cultures en terrasses artificiellement irriguées

CHILI

 

Chaque communauté se suffit à elle-même et n’échange que très peu de choses avec les collectivités voisines. Elle est divisée en deux parties : celle d’en haut ou Hanansaya, et celle d’en bas ou Hurinsaya, entre lesquelles s’établit une compétition qui, souvent, engendre des rivalités sérieuses.

Aucun peuple de la planète n’a su, comme les Incas, exploiter le sol et cela au mépris d’une terre des plus ingrates par sa configuration et sa nature. On peut même dire de ces derniers qu’ils sont les plus grands agriculteurs du monde.

Ce résultat a été obtenu par une division dans le travail, qui tint compte de l’âge et du sexe de chaque individu mis à contribution.

Jusqu’à l’âge de neuf ans, le petit Inca est libre de faire ce qu’il veut. Tout au plus lui demande-t-on d’aider son père ou sa mère dans les besognes domestiques. De neuf à douze ans, le garçon est envoyé dans les champs afin de surveiller les plantations de maïs et d’éloigner les oiseaux qui s’attaquent aux épis. La fillette doit récolter les plantes utilisées pour teindre les étoffes. De douze à vingt ans, le jeune Indien mène les lamas au pâturage et commence à apprendre un métier manuel. Quant à la fille, elle s’initie aux différentes formes de l’artisanat ainsi qu’à la fabrication de la chicha de maïs, véritable boisson nationale utilisée au cours des fêtes. De vingt à cinquante ans, les Indiens adultes doivent se marier. Vers la soixantaine, ils ont droit au plus grand respect et on vient les consulter pour tout ce qui a trait au développement de la communauté. La femme vieillissante est souvent chargée de l’éducation des enfants, du filage et du tissage.

Les mariages sont réglementés dans une certaine mesure par l’Inca en personne et les gouverneurs de province.

Chaque année, les inspecteurs se rendent dans les villages et prient les adultes célibataires des deux sexes de s’aligner, les hommes d’un côté, les femmes de l’autre, encourageant chacun d’eux à choisir un partenaire. Les familles sont consultées mais le clergé n’intervient pas dans cette affaire.

Le célibat est presque impossible chez les hommes car l’empire a besoin de monde. On le tolère pour les femmes ; ces dernières ne sont d’ailleurs pas malheureuses car elles reçoivent la part des terres qui leur revient.

La polygamie n’existe qu’à l’échelon le plus élevé de la société. La première épouse est la seule légitime ; les autres ne sont que des concubines. Un homme qui a perdu son épouse légitime peut se remarier mais jamais avec l’une de ses concubines.

Il y a plusieurs façons d’acquérir ces dernières, soit par héritage – un homme reçoit toutes les concubines de son père – soit à la suite d’une guerre, étant donné que les femmes des tribus soumises par les Incas et choisies principalement parmi les membres de l’aristocratie, sont distribuées entre l’empereur, les représentants de la famille royale et ceux de la noblesse.

La femme enceinte suit un régime sévère qui s’étend aussi à son mari.

L’accouchement se fait de la manière la plus naturelle qui soit, sans douleur, l’Indienne se mettant en position accroupie, aidée ou non de quelques voisines.

Le cordon ombilical est conservé comme talisman. Le bébé, lavé et emmailloté, est placé dans une sorte de berceau en bois, à quatre pieds, portable.

A l’âge de trois ou quatre ans, le jeune Indien est l’objet d’une fête appelée le rutuchicuy au cours de laquelle on lui coupe les cheveux pour la première fois de son existence.

A la puberté, le garçon revêt un pantalon et une veste. Puis il reçoit son nom qui est celui d’un ancêtre auquel on ajoute encore le nom d’une plante ou d’un animal. La fillette, au moment de la première menstruation, doit jeûner trois jours. On la lave et elle porte des vêtements de femme. Son oncle lui choisit le nom qu’elle portera toute sa vie.

La garde-robe de l’Inca se compose d’un pantalon de laine de lama, d’une chemise sans manche, l’unco, et d’un caleçon ou chache-sexe, le huara. Il chausse des ojotas en cuir et porte une petite bourse, en laine, la chuspa, dans laquelle il conserve de menus objets et des feuilles de coca.

La femme s’enveloppe dans une étoffe retenue à la ceinture et une cape, la lijlia, où elle pique une grosse épingle décorée, en argent ou en cuivre, le tupu.

Le mariage à l’essai, le servinacuy, vient à l’encontre de la thèse qui prétend que les unions obligatoires et décidée par les gouverneurs de province. Ceux-ci se bornent en réalité à rendre officielle une cérémonie d’ordre public.

Les Incas savent multiplier à l’infini la surface des champs de cultures en employant la méthode des terrasses sur les flancs escarpés de la Cordillère des Andes et qui s’avancent parfois jusqu’au bord de l’abîme. Ce procédé ingénieux, hérité des civilisations antérieures, permet en outre de lutter contre l’érosion du sol, qui est très forte en montagne, et d’utiliser l’eau sans perdre la moindre goutte.

L’irrigation est à la base de cette agriculture réalisée dans des conditions exceptionnelles.

Les Incas construisent des acequias qui s’étendent sur des centaines de kilomètres, ainsi que des aqueducs qui traversent les vallées les plus profondes. L’un d’eux, aménagé sous le règne de l’empereur Virachocha, mesure trois mètres de large et deux cents kilomètres de long. Des tunnels ont été creusés dans la montagne, des rivières endiguées, corrigées et détournées. Enfin, l’eau est emmagasinée dans d’énormes réservoirs à partir desquels se fait la distribution grâce à un système d’écluses.

Notre admiration est d’autant plus grande que ces travaux gigantesques sont réalisés sans l’emploi d’outils ni de machines et qu’ils n’ont été possibles que grâce à la collaboration de milliers de volontaires.

Les paysans incas savent cultiver une multitude de végétaux : des céréales, des légumes, des fruits, procédant par sélection, parmi lesquels on compte des centaines d’espèces de pommes de terre. Le maïs est à la base de leur alimentation mais, sur les hauteurs de la cordillère, il est remplacé par la quinua.

 

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Maison à Cupo (CHILI)

 

Pour tracer les sillons ils emploient une charrue qui se rapproche de la houe, la taclia, qui est encore en usage de nos jours chez les habitants de la montagne. Ils font venir le guano du littoral à dos d’homme ou de lama, en empruntant les routes admirables qu’ils ont construites.

Près de Cuzco se trouvent des plantations de maïs que l’on consacre au Soleil. Sa culture est assurée par des membres de la famille royale auxquels, très souvent, s’associe l’Inca qui n’hésite donc pas à se salir les mains. C’est également au souverain que revient le soin de tracer à la charrue les premiers sillons toutes les fois qu’un champ de cultures est réservé à des fins religieuses.

 

Texte et image :

Jean-Christian Spahni

 

La prochaine fois nous aborderons la justice et les lois au pays des Incas…

 

Bisous,

@+

Sab

16 septembre 2012

Arthur Rimbaud en prose…

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Ah que coucou !

 

Suite au petit incident d’hier et à une Sab devenue rouge comme une tomate ;), je poste ce nouveau billet aujourd’hui alors que j’avais prévu autre chose pour ce jour consacré au repos dominical… (non, là, pas de risque d’erreur, il ne s’agit que de la photo d’Arthur Rimbaud se trouvant sur ses œuvres complètes ;))

 

Arthur Rimbaud, j’avoue, je connais mal, peut-être parce que comme beaucoup, nos profs se sont évertués à nous faire apprendre par cœur de nombreux poèmes qu’il a écrits… et ceux-ci étant nombreux (à une époque notre prof devait être un fan de Rimbaud car il nous avait fallu en apprendre 5 de lui en moins d’une année !! ;) et malgré que je ne suis jamais allée à l’école dans les Ardennes). Je suis donc restée plusieurs années avec en tête un Arthur Rimbaud synonyme de devoirs scolaires (quand ce n’était plus les poèmes à apprendre par cœur, c’est devenu les poèmes à expliquer)… Ce n’est donc que quelques années après que j’ai terminé mes études que j’ai ouvert, à nouveau, un livre regroupant quelques-uns de ses poèmes… Toutefois nous n’allons pas débuter cette série consacrée à Arthur Rimbaud par de la poésie en vers, mais par ses premiers écrits (alors qu’il n’avait pas encore 10 ans pour continuer avec certains écrits à l’adolescence) en prose et par certaines des lettres qu’il a envoyées à certains de ses amis, dont son ancien professeur Mr. Georges Izambard avec lequel il avait gardé d’excellentes relations amicales, et, naturellement, sans oublier l’amour de sa vie : Paul Verlaine (amour jusqu’en 1875)… Ce regroupement de différents écrits, je l’ai appelé :

 

Divers Ecrits,

accessible au téléchargement/lecture en cliquant ici

format : pdf

(logiciel fourni gratuitement par Adobe)

Langue : français

 

qui rassemblent par ordre chronologique les premiers écrits en prose :

 

Prologue

Charles d’Orléans à Louis XI

Un cœur sous une soutane

Lettre du Baron de Petdechèvre à son secrétaire au château de Saint-Magloire

Les Déserts de l’Amour

[suite Johannique]

 

et quelques-unes de ses lettres adressées à :

 

Théodore de Banville

Georges Izambard

Paul Demeny

Ernest Delahaye

Paul Verlaine

 

Tout ceci va vous permettre d’avoir une nouvelle approche de cet auteur…

 

Bonne lecture !

 

Bisous,

@+

Sab

 

Nota : la prochaine fois sera copiée la Préface du livre Poésie Complète, préface élaborée par Paul Claudel qui introduira le téléchargement des différents poèmes qu’Arthur Rimbaud n’a jamais regroupé dans un ouvrage – j’ignore encore si j’y ajouterai Illuminations et Une saison en Enfer ou si je les mettrai dans un autre billet… on verra !

9 septembre 2012

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Jean voit de sa fenêtre passer un petit pâtissier portant une manne sur la tête. Cela lui suggère un bon tour à faire. « - Je vais bien rire », dit Jean.

 

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Là-dessus il prit une grosse pierre et la jeta dans la manne du pâtissier pour en fausser l’équilibre et renverser ce qu’elle contenait.

 

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La pierre, en tombant dans un coin du panier, le fit chavirer, projetant un récipient plein de sauce. Celui-ci vint coiffer Jean, qui était loin d’attendre pareil effet de son bon tour !

 

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Jean fut inondé et son complet neuf des dimanches n’était plus mettable. Il ne rit plus, c’est au tour du petit pâtissier à s’esclaffer de la mine piteuse du pauvre Jean.

 

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A quelque temps de là, Jean vit passer sous ses fenêtres un de ses petits camarades. « - Je vais lui jouer un tour » se dit-il, et il se posta près de la porte de la maison, recouvert de la peau d’ours du salon.

 

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Quand son camarade fut à quelques pas de la porte, l’ours apparut brusquement, faisant une peur terrible au jeune garçon. Jean se mit à rire du succès de sa farce.

 

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Mais à ce moment passa un bouledogue qui, apercevant l’animal, se jeta dessus et le mordit à belles dents. Un cri de douleur s’échappa de la peau d’ours.

 

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C’était Jean qui venait d’avoir un bout de l’oreille emporté par le chien et qui hurlait à fendre l’âme, pendant que son compagnon, remis de sa frayeur, riait à ventre déboutonné.

 

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Ces aventures n’arrivèrent pas à guérir Jean de sa manie de jouer des tous à son prochain. Le voici tenant une bouteille d’encre violette et se dirigeant vers un baquet dans lequel une blanchisseuse vient de faire son bleu.

 

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« - Je vais bien rire, dit Jean, quand la blanchisseuse verra son linge violet au lieu de bleu. » A ce moment, une sirène d’automobile jeta dans l’air sa plainte lugubre. Un gros bélier effrayé…

 

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… fonça cornes en avant, droit devant lui. Ce fut Jean qui reçut la secousse et disparut dans le baquet avec sa bouteille d’encre.

 

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Quand il se releva, Jean était tout violet. Ce fut au tour de la blanchisseuse de rire devant la punition sévère que le hasard venait d’infliger au trop facétieux petit garçon.

 

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[texte des deux colonnes sous cette image]

 

Canard américain.

 

Un journal américain eut la fantaisie d’annoncer un jour, que Thomas Edison venait d’inventer un type de chemise que l’on pourrait porter une année entière sans recourir aux offices d’une blanchisseuse. Cette extraordinaire chemise était formée de trois cent soixante-cinq feuilles prodigieusement fines, fabriquées avec une matière fibreuse dont la composition était le secret du savant.

Il suffisait donc d’enlever, chaque jour, une de ces feuilles pour avoir une chemise d’une fraîcheur immaculée. [Fin colonne]

 

Nombre de journaux reproduisirent ce racontar, et, avec une admirable naïveté, leurs lecteurs y ajoutèrent foi.

Les lettres commencèrent à pleuvoir chez Edison. Beaucoup contenaient des chèques ou des billets de banque envoyés par des gens pressés de posséder l’idéale chemise.

Il vint des missives de toute l’Amérique, de la Chine, de l’Australie, de l’Afrique, etc.

Enfin, las de cette plaisanterie qui tournait à la persécution, Edison fut obligé d’annoncer officiellemeent que le public s’était laisser berner. [Fin colonne]

 

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[Fin colonne]

 

[Colonne 3]

 

Pour rendre la voix au ténor.

 

Au XVIIIe siècle, on usait parfois de certains moyens radicaux, dans la cité des doges, pour réduire à la raison les artistes capricieux.

Le ténor Guadagni avait chanté trois soirs de suite, avec beaucoup de talent et un très vif succès, un opéra nouveau. Le quatrième jour, il devint tout à fait médiocre. Croyant à une indisposition, le public fit preuve d’indulgence envers son chanteur favori et ne lui ménagea point, malgré sa déception, ses chaleureux applaudissements.

Le cinquième jour, Guadagni se montra détestable et l’on sentit nettement que c’était à dessein, pour faire tomber l’opéra.

Après le premier acte, deux spectateurs s’approchèrent de la rampe et, d’un ton courtois mais très ferme, conseillèrent à l’artiste de s’excuser d’abord et de chanter ensuite proprement.

Guadagni se contenta de hausser les épaules. Après le second acte, où il fut encore pire, les deux mêmes personnages renouvelèrent leurs avertissements ; le ténor n’en tint aucun compte. Le spectacle terminé, comme il se disposait à partir en gondole, quatre hommes vigoureux, la figure couverte d’un masque noir, s’emparèrent de lui, le ligotèrent, l’enlevèrent et le déposèrent dans une cave obscure où, pour souper, il n’eut qu’un petit pain.

Comme l’artiste réclamait un menu plus copieux, on lui répondit qu’il serait mieux servi quand il aurait chanté convenablement.

Le ténor avait de l’appétit ; mais il avait encore plus d’amour propre. Il s’obstina et, boudant contre son ventre, il refusa le lendemain d’aller chanter au théâtre. On le laissai dans sa prison et, ce jour là, il n’eut même pas de petit pain, ce qui fit que le jour suivant il accepta avec empressement de reparaître en scène.

- Vous vous trompiez, lui dit alors un des quatre hommes masqués, quand vous pensiez que personne ne pourrait vous contraindre à faire votre devoir. Savez-vous qui je suis ?

- Vous êtes, murmura le ténor frappé d’un respect soudain, vous êtes le doge de la Sérénissime République !

- Non pas, répondit l’inconnu, en soulevant son masque, je ne suis que le bourreau, et voici mes trois aides !

Ce soir-là, Guadagni, parait-il, comme de mémoire d’homme aucun ténor n’avait jamais chanté.

 

R.

 

 

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M. Double était excessivement gros et passablement naïf. Il s’était laissé envahir par la graisse et cela le gênait beaucoup. Il avait beau prendre les remèdes prônés par les réclames des journaux, rien n’y faisait.

 

 

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Dubois, son ami intime, lui conseilla de faire beaucoup d’exercice. « - Pour arriver à un résultat, répondit M. Double, il faudrait une persévérance dont je me sens, hélas ! incapable.

 

 

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- Alors, dit l’ami, essaye un autre moyen. Il y a dans la maison que j’habite un sorcier qi traite ton cas. Il demeure au septième étage, prote en face. Va le voir. »

 

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Double y monta le lendemain. Un homme aux cheveux et à la barbe blancs lui ouvrit la porte. La pièce était étroite et bizarrement meublée.

 

 

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Le sorcier dit au gros homme : « - Vous pouvez maigrir, monsieur. Pour cela, vous n’avez qu’à embrasser cent fois le petit crapaud de bronze que voici. »

 

 

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M. Double allait se précipiter sur le crapaud pour le couvrir de baisers, mais le vieillard l’arrêta d’un geste : « - Malheureux, dit-il, qu’alliez-vous faire là ?

 

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 « Sachez que si vous l’embrassiez plus d’une fois par jour, vous seriez frappé de mort subite. Il vous faudra venir ici chaque matin, sans manquer un seul jour. »

 

 

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Dès le lendemain, M. Double grimpa les sept étages et arriva en haut tout en sueur. Néanmoins il recommença le lendemain et les jours suivants, et après avoir embrassé le crapaud enchanté, il redescendait.

 

 

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Déjà, au bout de quinze jours, les escalier lui paraissaient moins durs à grimper, sa graisse commençait à fondre et il devenait plus agile.

 

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L’effet continua à se produire, si bien que quand arriva le cent et unième jour, M. Double avait retrouvé toute sa sveltesse et sa souplesse d’autrefois. Il alla remercier son bienfaiteur.

 

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Alors le vieillard lui dit : « - Pourquoi n’avez-vous pas suivi le conseil de votre ami Dubois qui vous disait de faire un petit exercice chaque matin ? – Cela aurait été au-dessus de mes forces, répondit M. Double, Dubois ne me connaît pas.

 

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A ce moment le sorcier enleva sa fausse barbe et sa perruque, et Dubois lui-même apparut : « - Si, je te connais, dit-il, et c’est pour cela qu’ayant loué cette mansarde, j’ai trouvé le moyen de te faire grimper chaque jour sept étages. Cela a suffi à te faire maigrir. Quand au crapaud de bronze, il n’a aucune vertu ; c’est un vieux presse-papier bien inoffensif. »

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« En effet, on me réveilla à cinq heures, et nous voilà roulant par la campagne de France, que je ne connaissais pas.

« Durant le voyage, Muddy et Paddy furent d’une gaîté folle.

« - Enfoncés, les requins ! disait Muddy.

« - S’ils attendent au Havre, ils ont le temps de faire le pied de grue ! répliquait Paddy.

« Je me demandais quels pouvaient bien être ces requins-là, mais je n’osai poser de questions.

« ‘Enfin, Muddy prononça :

« - On vient de passer Asnières, nous sommes arrivés !

« Paddy boucla la valise, qu’il avait déposée dans le filet, après y avoir serré une casquette de voyage, Muddy passa les manches de son grand ulster, et tous deux se tinrent debout, devant la portière, dans le couloir du wagon.

« Le train passa sous un long tunnel, puis ralentit sa marche ; bientôt il pénétra sous un grand hall et s’arrêta définitivement.

« Le premier, Paddy sauta sur le quai, puis Muddy, qui, lui, se retourna vers moi, sans doute pour m’aider à descendre.

« Mais alors, il se passa une chose vraiment extraordinaire.

« Deux messieurs se précipitèrent sur Muddy et Paddy, et avant qu’ils eussent eu le temps de faire un mouvement, ils leur passèrent une chaîne au poignet, et rapidement les entraînèrent.

« Cela avait été si rapide, si subit, si inattendu que je n’eus même pas la force de prononcer une parole, de jeter un cri, et, quand je revins de ma surprise, ce fut pour entendre, autour de moi, des gens qui disaient :

« - Ce sont deux Anglais, les voleurs de la South-West-Bank, que l’on vient d’arrêter !

« - Oui, fit un autre, des détectives les attendaient au Havre, mais ils sont arrivés par Dieppe, ou par ailleurs. Heureusement que leur signalement avait été téléphoné à la Sûreté !

« Alors, je compris, mais seulement, ce que Muddy et Paddy avaient voulu dire en parlant des requins.

« Cependant, nul ne faisait attention à moi : je pus m’éclipser au milieu de la foule ; toute la journée, j’ai erré dans Paris me demandant ce que j’allais faire, et ce soir, affamée, morte de fatigue et de je suis tombée sur ce banc où tu viens de me retrouver.

« Et voilà toute mon histoire, mon bon Mironton ! [Fin colonne 1]

 

 

 

CHAPITRE IV

 

Mironton avait écouté sans l’interrompre cet étrange et dramatique récit.

Puis, quand la fillette eut fini, il apprécia :

- Ben vrai, on peut dire que t’en as eu, des malheurs ! Mais, à présent, qu’est-ce que tu comptes faire ?

- Je ne sais pas ! répondit la fillette.

Puis, après une minute de réflexion, elle dit :

- J’avais pensé à retourner à Londres, chez Mrs Shad !

Mais Mironton secoua la tête :

- Faut pas ! décida-t-il gravement. Ecoute ! Tout de suite, ton Muddy et ton Paddy m’ont fait mauvaise impression, et je ne suis pas étonné qu’on les ait empoignés en arrivant à la gare

 

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Saint-Lazare. Il est de toute évidence que ces deux English-là voulaient t’entraîner dans quelque sale coup, et ils ne connaissaient pas non plus ton oncle Lolo que moi ; c’était de la frime ! Ta Mrs Shad, sûrement les connaissait, et elle devait être de mèche avec eux, tu comprends ! Alors, faut pas retourner chez cette femme !

- Oui, acquiesça Blanchette, tu as peut-être raison, puisque c’est miss Dorothea, la fille de Mrs Shad, qui m’a remis entre les mains de Muddy.

- Parbleu ! triompha Mironton. Il te resterait donc d’aller tout raconter au commissaire. Mais je ne te le conseille pas non plus. Vois-tu, ma fille, faut jamais mettre la police dans ses affaires, tant [Fin colonne 2]

 

qu’on n’y est pas forcé. Qu’est-ce qui t’arriverait si tu allais te mettre sous la protection du quart d’œil ? Il ferait une petite enquête, retrouverait ton oncle Camille, qui est ton tuteur, et te refourrerait dans ses pattes. Or, je ne sais pas, c’est une idée à moi, mais les micmacs de ton oncle Camille ne me paraissent pas francs du collier !

Pour toute réponse, Blanche Delatre poussa un gros soupir, et Mironton reprit :

- Vois-tu, ce qu’il faut, c’est retrouver ton oncle Lolo ; ce doit être un bon zigue, ton oncle Lolo ; je ne le connais pas, mais il me semble que je l’aime déjà ! S’il habite Paris, ce ne doit pas être difficile d’y mettre la main dessus. Comment c’est-il qui s’appelle, ton oncle Lolo !

- Il s’appelle mon oncle Lolo ! répondit Blanche.

- C’est pas un nom ça !

- Je ne lui en connais pas d’autre !

- C’est le frère de ta pauvre maman, n’est-ce pas ?

- Oui !

- Et comment qu’elle s’appelait ta maman ?

- Mme Delatre !

- Bien entendu ! Mais son nom de jeune fille !

Blanchette hocha la tête :

- Je ne sais pas ! fit-elle piteusement.

Du coup Mironton leva les bras au ciel :

- Si tu ne sais pas comment qu’il s’appelle, fit-il, ce sera plus durillon pour le trouver !

- Alors ?

Mironton s’était plongé dans ses réflexions :

- Alors, fit-il enfin, on y pensera, et c’est bien le diable, si on ne trouve pas un moyen ! J’ai toujours entendu dire que la nuit portait conseil, et voici justement que le jour se lève ! Il s’agit, pour l’instant d’aller gagner mon déjeuner, et le tien ! Quand je t’ai trouvée, sur ce banc, j’allais m’envoyer un bon coup de traversin, à l’auberge de la Belle Etoile, dont je suis un des plus assidus clients, sous le pont de la Concorde, où il y a toujours des sacs de plâtre, où c’est plus mou que sur la pierre. Mais il ne s’agit plus de dormir, pour moi du moins !

On va aller aux Halles, on mangera une bonne soupe, puis, tandis que j’irai à mon travail, je te trouverai un bon dodo, car tu tombes de fatigue, ma pauvre petite, et t’as rudement besoin de te remettre un peu de toutes les émotions !

Et, ce disant, il se leva, prit la petite par la main, et tous deux se dirigèrent vers la place de la Concorde.

Le jour se levait, en effet, et là-bas, par delà les arbres des Tuileries, on apercevait dans le ciel une grande raie lumineuse, d’un rose très pâle et les becs de gaz commençaient à clignoter dans la douce clarté de l’aurore. [Fin colonne 3]

 

 

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Descendant les Champs-Elysées, une file ininterrompue de charrettes chargées de choux, de carottes, de salades, de navets, se dirigeait vers les Halles d’un pas lent. Les conducteurs, pour la plupart, dormaient tout là-haut, dans la fraîcheur des légumes, et leur bête, à demi somnolente, suivait docilement la file, sans que leur maître eût à s’occuper d’elle.

Pourtant, conduisant une énorme voiture de choux, un homme, tout recouvert d’une immense limousine qui lui descendait jusqu’aux pieds, marchait à côté de son cheval tout en fumant une courte pipe.

Mironton le reconnut, et il le salua :

- Bonjour, Toine, vous n’êtes pas en avance ce matin ?

L’homme tourna la tête, et, souriant :

- Tiens, c’est toi Mironton ?

Et du manche de son fouet, désignant la fillette :

- T’as donc trouvé une compagne ?

- C’est ma petite sœur.

- Ah bah ! T’as donc de la famille ? Tu n’en avais jamais parlé, vieux camarade ?

- C’est qu’elle était à la campagne ! Je viens de la tirer de nourrice, assura Mironton.

- Et comment que tu l’appelles, ta sœur ?

- Parbleu, Mirontaine ! répondit Mironton en éclatant de rire.

Toine regarda la fillette, puis :

- Elle est bien pâlotte, ta petite sœur ! et puis, on dirait quasi qu’elle peut plus se traîner ! C’est-y aux Halles que tu te rends ?

- Comme tous les matins, Toine !

- Alors, hisse ta sœur sur la carriole, ça la reposera un peu, cette pauvre gosse !

- Ma foi, c’est pas de refus, Toine !

Et Mironton aida Blanchette à grimper sur la charrette, où, parmi les choux, il lui fit une façon de petit creux où elle pourrait se tenir sans danger ; puis il descendit et se mit à marcher à côté du maraîcher, tout en discourant de la pluie et du beau temps, qui ont une si grande importance pour un jardinier des environs de Paris.

Ce Toine était un brave garçon, à qui souvent, le matin, Mironton donnait un coup de main pour l’aider à décharger ses légumes sur le carreau des Halles ; Toine lui donnait quelques sous pour le payer de sa peine, et, il ne se passait pas un jour qu’il ne lui dit :

- Mironton, un de ces dimanches, faudra nous venir voir à Nanterre ; le père et la mère te recevront bien, car tu es un brave petit gas, et l’on tuera un lapin, en ton honneur !

Et Mironton promettait toujours. Mais les dimanches succédaient aux dimanches sans qu’il tînt sa promesse. Le pauvre Mironton n’avait guère le temps de se payer un pareil voyage, et puis, pour tout dire, la campagne lui faisait un peu peur.

Et, ce matin-là, le bon Toine ne manqua pas de renouveler son invitation :

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- De ce coup, mon gas, tu vas nous venir voir à Nanterre, cela fera du bien à ta sœur, une journée de bon air et de verdure !

- Pour sûr, promit Mironton, que je vous mènerai Mirontaine !

Mais ils arrivèrent aux Halles.

Pendant le trajet, la pauvre Blanchette, brisée de fatigue, s’était endormie parmi ses choux et on eut du mal à la réveiller.

- Pauvre goss ! murmura Mironton, va falloir que je la mène au dodo !

- Où ça ? demanda Toine, intrigué.

- Vous occupez pas de ça, Toine, je connais les bons endroits ! Espérez-moi seulement cinq minutes, et je m’en vais lui border sa couverture !

Blanchette avait les yeux tout barbouillés de sommeil et, automatiquement, elle suivit Mironton.

Il se dirigea ver le pavillon de la volaille, descendit un escalier et se trouva dans les sous-sols, tout encombrés de cages à poulet, où, déjà, une douzaine de jeunes femmes étaient toutes occupées à plumer des volailles, dont les plumes voltigeaient de droite et de gauche, couvrant leurs vêtements, s’agrippant à leurs cheveux, s’amoncelant en des coins, véritables montagnes de duvets.

- Holà ! Miroton, tu viens nous donner un coup de main ? demanda une des plumeuses.

- Pas ce matin, car il faut que j’aille aider Toine.

- Alors, tu nous amènes une aide ! ajouta la femme, en voyant la fillette que Mironton tenait par la main.

- Pas pour aujourd’hui. Ma petite sœur arrive de voyage et elle tombe de sommeil, comme vous le voyez, aussi, j’ai pensé que vous lui laisseriez piquer un petit coup de poinçon…

- Comment donc, est-ce que ça se refuse, ces [Fin colonne 2]

 

choses-là ! Arrange-là toi-même, car tu connais les bons endroits, brigand !

Mironton ne se le fit pas dire deux fois ; au fond de la salle, entre deux piles de cages vides, il amoncela un bon matelas de plumes et de duvets, y fit étendre Blanchette, puis, lui dit :

- Et tu sais, dors ton content… Je viendrai te réveiller, quand le moment sera venu !

Puis, ayant crié merci aux plumeuse de volailles, il s’en vint rejoindre Toine.

La fillette dormait déjà.

Mrionton était un courageux petit bonhomme qui ne boudait pas à l’ouvrage ; bravement il aida Toine à décharger sa voiture de choux ; tandis que Toine, huché sur la carriole lançait les choux sur la chaussée, Mironton, fort habilement les alignait sur le carreau, les montait en une muraille bien droite qui faisait plaisir à voir.

Quand ce fut fini, Toine dit au petit :

- Tu vas garder la marchandise, hein, pendant que je vais casser une croûte et boire un coup de vin ?

- Comme d’habitude ! répliqua Mironton.

Le jour se levait lentement, un jour sale et brumeux, prometteur de pluie ; autour des halles, c’était un bourdonnement de ruche en travail : chacun allait et venait, silencieux et affairé ; de grands haquets amenaient le poisson au pavillon des marées ; en sabots, couverts de tabliers tachés de sang, des garçons déchargeaient d’énormes quartiers de viande dans le pavillon de la boucherie ; les caisses et paniers de primeurs s’entassaient un peu partout, et de la rue du Louvre une forte odeur d’éther trahissait les tombereaux d’oranges que l’on déversait en vrac devant les magasins des commissionnaires et qui semblaient une coulée d’or roux ; maintenant, sur le carreau, on ne circulait plus qu’entre deux remparts de carottes, de choux, de salades, de navets et, sous la clarté pâle de l’aube, dans le brouillard, toute une activité régnait, tandis que là-bas, Paris dormait encore.

Comme le coup de cloche sonnait, indiquant que la vente en gros pouvait commencer, Toine revint relever Mironton de sa faction.

- Merci, mon vieux Mironton, lui fit-il avec une tape amicale, tu es un bon petit homme et tu sais, quand tu voudras venir à Nanterre, avec la petite sœur !

- C’est entendu ! fit Mironton, empochant la poignée de petite monnaie que Toine lui glissa dans la main.

Et il fila du côté de la pointe Saint- Eustache.

- Il ne s’agit pas de flâner, songea-t-il ; me voici chef de famille, j’ai gagné ma pitance, il s’agit d’aller gagner le déjeuner de Mirontaine, maintenant !

 

(A suivre.)

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Le vieux château d’Entraigues mire ses épaisses murailles dans les eaux d’émeraude de l’Etang-Vert, formé par la Mâlerne qui descend en torrent des montagnes voisines, pour s’élargir aux pieds du château et autour d’un îlot qui lui fait face, en un riant petit lac dont les eaux semblent dormir. Là, au temps des fées, vivait le seigneur Aubry d’Entraigues…

 

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… avec sa femme, la douce et languissante Ysabel, malade depuis longtemps, et leurs trois enfants : Amaury, dix ans, Ghislaine, sept ans et Olivain, cinq ans. Ce château était le patrimoine d’Aubry, mais la fortune qui était immense appartenait à sa femme. Un jour, Ysabel s’éteignit doucement et, sur sa prière, Aubry la fit inhumer dans l’îlot de l’Etang-Vert.

 

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Le sire d’Entraigues regretta peu sa femme, car il ne l’avait épousée que pour ses richesses et, peu après, il se remariait avec une jeune veuve d’une grande beauté, nommée Viviane d’Aurenne. Cette femme, ne possédant aucune fortune, avait elle-même, par contre, une fillette de trois ans, Maribel, et sa beauté était le seul don dont la nature l’eût dotée…

 

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… car elle était méchante et ambitieuse à l’excès. Elle ne tarda pas à exercer sur son mari un despotique empire. Les enfants de celui-ci étaient souvent maltraités par elle et par leur père même, car elle ne cessait de les lui représenter comme des gamins rebelles et vicieux. Les pauvres petits fuyaient le plus qu’ils pouvaient la présence de leur marâtre.

 

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Ils aimaient se tenir sur la berge de l’étang qui faisait face à l’îlot dont ils apercevaient le blanc mausolée où reposait leur mère et ils restaient là longtemps, implorant le secours de celle qui les avait tant aimés. Souvent, ils suppliaient leur père de les conduire auprès du tombeau qu’ils n’avaient jamais approché.

 

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Mais Aubry le leur refusait durement et, de crainte que les enfants ne fussent tentés d’y aller seuls, il tenait enchaînée au cadenas la petite barque qui, sur l’étang, excitait souvent leurs désirs. Cependant, les petits d’Entraigues grandissaient, et aussi Maribel d’Aurenne dont la mère était dévorée de jalousie…

 

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… à la pensée que sa fille qu’elle adorait, serait pauvre, tandis que ceux-là, qu’elle haïssait, possesseurs de tout le bien de leur mère, vivraient dans l’opulence. Sans cessé, en des discours adroits et perfides, elle insinuait à son mari que, ses enfants étant morts…

 

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… il hériterait de la fortune dont il n’avait que la jouissance et qu’à leur majorité ceux-ci lui réclameraient. Et elle couvrait en même temps les pauvres innocents des plus noirs défauts. Aubry qui, déjà, aimait peu ses enfants, à l’exception du petit Olivain, finit par céder aux criminels instigations de sa femme.

 

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Un soir que ses enfants l’imploraient à nouveau de les conduire à l’îlot, Aubry détacha la barque et y fit entre Amaury et Ghislaine. A dessein, il avait éloigné Olivain. Longtemps, dans un restant de scrupule, Aubry hésita et, sans aborder, il évoluait autour de la petite île.

 

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La nuit tombait déjà, qu’il balançait encore, et les enfants s’étonnaient que leur père mit si longtemps à aborder l’îlot. A un moment, s’étant tourné ver le château, Aubry distingua sa femme à une fenêtre ; le misérable se décida. Ils se trouvaient à un endroit très profond de l’étang. Les enfants, impatients, tournés vers l’îlot, se penchaient sur le rebord de la barque.

 

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Soudain, Aubry donna un brusque et violent coup d’aviron et les enfants tombèrent dans l’Etang-Vert. Epouvanté par l’horreur de son crime, Aubry se sauva à toutes rames, sans se retourner, de sorte qu’il ne vit pas sortir des eaux, à l’endroit même où il avait noyé ses enfants.

 

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… deux cygnes d’une blancheur resplendissante qui s’empressèrent de gagner l’îlot où semblait les attirer une blanche apparition. C’était l’âme d’Ysabelle d’Entraigues qui avait obtenu des fées habitant l’îlot, que ses chers petits fussent changés en cygnes au moment où la mort allait recueillir leurs âmes à la surface de l’étang.

 

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Ysabel couvrit les oiseaux de caresses et leur fit un nid à l’ombre du tombeau de marbre blanc, d’où elle sortait dès que la nuit s’étendait sur le lac, pour y rentrer sitôt que l’aube dissipait les voiles de la nuit. La méchante Viviane exaltait du succès de ses machinations.

 

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Mais quand elle vit qu’Olivain avait échappé à la mort et qu’Aubry était décidé à épargner son dernier né, elle résolut de se défaire elle-même de l’enfant. En attendant, la petite Maribel et lui étaient très liés. Un jour, les deux enfants aperçurent sur l’étang deux gracieux cygnes qui, loin de s’effaroucher, s’approchèrent et se laissèrent caresser par eux.

 

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Depuis ce jour, Olivain revînt souvent au bord de l’étang. Un soir qu’il s’y était attardé, Viviane parut et, attirant l’enfant vers un endroit du bord d’om le fond de l’étang ne se voyait pas, à cause de la grande profondeur, elle y précipita Olivain qui l’avait suivie sans méfiance, et se sauva en hâte. Mais les cygnes l’avaient vu et, plongeant sous les eaux…

 

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… ils ramenèrent l’enfant à la surface et le transportèrent dans l’îlot. Là, Olivain grandit en cachette, protégé par les fées et les cygnes qui pourvoyaient à sa subsistance. La nuit, l’âme de sa mère veillait sur lui.

 

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Au château, Aubry vivait maintenant dans un remords affreux. Chaque anniversaire de son épouvantable crime lui ramenait des nuits terribles où des rêves atroces lui représentaient la douce Ysabel qui venait lui demander ce qu’il avait fait de ses enfants.

 

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Maribel, cependant, se parait d’une grande beauté, mais si elle était encore plus belle que sa mère, elle était aussi vertueuse que Viviane méchante. Elle aimait se promener sur les bords de l’étang, songeant à son ami d’autrefois, Olivain, si mystérieusement disparu. Elle se plaisait à donner à manger aux cygnes et, plus d’une fois…

 

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… Olivain reçut d’eux les friandises que leur prodiguait Maribel. Ces cygnes étaient un mystère pour Aubry et Viviane, car dès que ceux-ci paraissaient vers l’étang, les oiseaux, pressentant leur approche, disparaissaient en plongeant, pour aller ressortir hors de leur vue. Mais ils aimaient les caresses de Maribel. Un soir d’été, la jeune fille, voulant trop s’approcher des cygnes, glissa dans l’étang.

 

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Les oiseaux la soutinrent en l’entraînant vers l’îlot, où Maribel eut l’extrême surprise de voir un beau jeune homme en qui elle reconnut Olivain. Celui-ci lui révéla le secret de sa disparition, due au crime de sa mère, et Maribel ne voulut plus retourner au château. D’ailleurs, un épouvantable orage sévissait.

 

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C’était justement le soir anniversaire de l’exécrable forfait d’Aubry. Cette nuit-là, aux transes de ses cauchemars, se mêlent de sinistres bruits : le vent hurle, la foudre gronde : les eaux si calmes de l’Etang-Vert battent les murailles. Soudain, un cri l’éveille : « - Aubry, Aubry, sauvons-nous ! Sauvons Maribel ! » C’est Viviane, folle de terreur.

 

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La Mâlerne, enflée par l’orage, envahit le château. L’eau gagna l’escalier, les salles basses !... Aubry ouvre la fenêtre : l’eau y clapote déjà !... Bonheur ! une barque heurte le mur… c’est celle qui lui servît à noyer ses enfants… Qu’importe ! c’est le salut ! Aubry y prend place avec sa femme, qui pousse des cris de désespoir, car Maribel a disparu !

 

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« - Gagnons l’îlot ! » crie Aubry. La barque ballotté flotte en tous sens sur l’étang et Aubry rame désespérément vers l’îlot, seul refuge possible. Soudain, deux grands cygnes paraissent devant l’esquif et l’empêchent d’aborder. Alors surgit une blanche apparition : « - Aubry ! Aubry ! qu’as-tu fait de tes enfants ? »

 

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C’en est trop ! Les deux criminels, terrassés par la peur, le désespoir, le remords, tombent dans la barque qui s’engloutit sous les flots. Le lendemain, l’Etang-Vert avait repris sa tranquillité. Une barque vide y flottait. Olivain et Maribel regagnèrent le château où, peu après, ils se mariaient. Ils y vécurent longtemps dans le bonheur et la vertu.

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Marcel Perquin était un enfant de huit ans. Ses cheveux bruns, ses yeux intelligents, sa physionomie souriante en faisaient un être charmant.

Excellent élève à l’école de Beaupont, affectueux avec ses parents, il n’avait qu’un défaut, mais assez grave pour assombrir ses belles qualités : il était désobéissant.

Aux heures de classe et le dimanche, où il se sentait surveillé, Marcel paraissait docile. Dès qu’arrivait le jeudi, comme ses parents, très occupés, ne pouvaient exercer leur vigilance sur le petit garçon, il agissait à sa guise et s’en repentait toujours.

D’ailleurs, qui pourra jamais compter les bêtises que font les enfants, le jeudi ?

C’est le jour des escapades, des maladresses et des catastrophes. Marcel en fit l’expérience à ses dépens.

Se trouvant seul, de bon matin, il se dirigea vers la Seine. Ayant improvisé une ligne avec une branche d’arbre, une ficelle et un appât quelconque, il se proposait de pêcher, non pour manger une friture qu’il n’eût pas osé rapporter chez lui, mais pour éprouver son adresse et sa chance. Il sut bientôt à quoi s’en tenir sur ces deux points.

En approchant du fleuve, à l’endroit où tous les bateaux du pays étaient amarrés, il aperçut un garçon plus âgé que lui, nu-tête et nu-pieds, mal vêtu et qui, assis à l’avant d’une barque dans laquelle étaient sa boîte d’asticots et un panier sale, tendait au-dessus des flots une ligne de bonne fabrication. Ce premier occupant lança un regard méfiant au nouveau venu qui s’installait dans le bateau voisin, mais le voyant si jeune et si mal muni, il pensa n’avoir rien à craindre d’un tel concurrent et cessa de l’observer.

Cela ne faisait pas l’affaire du jeune Perquin, disposé à se renseigner sur un art qu’il connaissait peu.

- Y a-t-il beaucoup de poissons par ici ? demanda-t-il.

- Des fois.

- En as-tu déjà pris aujourd’hui ?

Sans répondre, l’autre ouvrit son panier qui laissa voir quelques goujons parmi lesquels deux ou trois se débattaient encore.

- Oh ! je voudrais bien en attraper autant ! s’écria Marcel.

Pour imiter son compagnon, qu’il supposa expérimenté, il s’assit à l’avant de la barque, laissant prendre au dehors ses petites jambes, et jeta le piège en attendant la dupe.

L’inconnu le regarda et sourit de sa naïveté car la ligne d’occasion était trop courte, peu flexible et l’hameçon atteignait l’eau à peine.

L’enfant, plein d’espoir, se fatigua vite de l’immobilité et bavarda pour passer le temps.

- Ils ne veulent pas mordre, dit-il enfin. C’est ennuyeux.

- Tais-toi, riposta le voisin. Tu ne fais que parler et le bruit effraye les poissons.

Marcel se pencha pour mieux voir.

- Oh !... En voilà un qui vient… un gros… il approche… je crois qu’il…

Il tomba tout droit, sentant l’eau dans sa bouche, son nez, ses oreilles, ne pouvant plus respirer, puis, son pied toucha un obstacle et il remonta rapidement, revit la lumière à travers ses paupières closes, se débattit, reprit haleine et ses doigts se crispèrent sur un bâton oscillant. Alors il ouvrit les yeux. Le jeune pêcheur, qui lui tendait sa ligne, l’encourageait de la voix :

- Tiens ferme… Ne crie plus… Laisse-moi faire.

La ligne ramenée doucement conduisit l’imprudent jusqu’à la barque où il se cramponna et put monter, grâce à l’aide vigoureuse du sauveteur.

Fou de joie, il balbutia :

- C’est gentil, ce que tu as fait là… Sans toi, j’étais noyé… Merci… Merci.

Jetant ses bras mouillés au cou du camarade

[Fin colonne 1]

de rencontre, il l’embrassa sur les deux joues puis éclata en sanglots. L’autre, malgré sa nature fruste, s’attendrit.

- Mon pauvre petit, dit-il, tu es trempé… Tu vas prendre froid… Faut rentrer chez toi bien vite pour te sécher.

- Je vais être grondé !... On m’avait défendu de jouer au bord de l’eau.

- Ben !... T’en seras quitte pour recevoir une paire de gifles… Je sais ce que c’est… On n’en meurt pas… Faut pas se tenir à l’ombre pour grelotter… Cours au soleil… Où que tu restes ? C’est-y loin ?

- A la gendarmerie de Beaupont.

- Y a pas dix minutes de chemin… Va vite.

Marcel Perquin s’éloigna bien triste et bien penaud. Il arriva à la caserne où Mme Eblin, la femme du brigadier, qui traversait la cour, l’aperçut. Elle vint à lui et, comme il la savait bonne, il avoua sa faute, sans réticence.

- Tes parents ne sont pas rentrés… As-tu la clef du logement ? demanda-t-elle.

Par bonheur, il la trouva dans sa poche. Mme Elbin qui, elle aussi, avait un fils et n’ignorait pas les ennuis que les enfants causent à leur famille, s’occupa, tout en grommelant, de déshabiller le noyé qu’elle mit au lit et réchauffa d’une tasse de thé au rhum, ce qui fit grand plaisir à Marcel.

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Enfin Mme Perquin rentra. Mise au courant de l’aventure et bien qu’elle vit son fils sauf, elle pleura d’émotion, ce qui l’empêcha de penser à un châtiment quelconque.

Le trouvant un peu rouge et redoutant la fièvre, elle courut chez le docteur Mérignon, qu’elle ramena.

Le médecin était très aimé de Marcel dont il avait récemment soigné une grave bronchite. Il entra, furieux contre son jeune client.

- C’est ainsi que tu achèves ta convalescence, mauvais sujet ! Tu vas peut-être gagner à ce jeu-là une congestion pulmonaire.

L’enfant eut peur. Il entrevit les drogues, la diète et regretta plus encore son escapade.

- Je ne me sens pas malade, dit-il. Seulement j’ai chaud.

M. Mérignon lui tâta le pouls et l’ausculta.

- Rien d’anormal pour le moment, affirma-t-il. Ecoute-moi, Marcel, si tu aimes ton père et ta mère, si tu veux être la joie de leur vie et la consolation de leur vieillesse, sois obéissant. Nous avons perdu notre fils, comme les parents ont failli le perdre aujourd’hui, parce qu’il nous a désobéi.

- Qu’a-t-il donc fait ? demanda Mme Perquin.

- Etant au marché avec sa bonne à Poissy, il l’a quittée pendant qu’elle faisait un achat et a disparu.

- Quel âge avait-il ?

- Six ans… Il en aurait onze aujourd’hui. Toutes les recherches restant vaines, on eut l’idée d’aller au bord de l’eau car, malgré notre défense, il s’en approchait toujours et on nous rapporta son chapeau, tombé dans les herbes du [Fin colonne 2]

rivage. Jamais le corps de notre pauvre Albert ne nous fut rendu. Cinq ans se sont écoulés depuis cet affreux malheur qui nous a fait quitter le pays où j’avais une belle clientèle. J’ai tout sacrifié pour arracher ma femme au désespoir qui l’eût conduite à la folie et depuis dix-huit mois, nous sommes ici, non pas plus heureux, mais plus résignés.

Des larmes s’échappèrent des yeux de la mère qui entendait ce triste récit et quand le docteur, après un court silence, put maîtriser son émotion, il dit en tapotant la joue de Marcel :

- Je crois inutile de le garder à la maison. Laissez-le jouer dans le jardin, je reviendrai demain.

La nuit fut bonne et le matin, Marcel Perquin qui se souvenait d’avoir déjà vu son sauveteur la veille vendre des paniers aux clients des cafés voisins de la gare, se dirigea de ce côté, après l’école, et l’apercevant, courut à lui.

- Viens vite chez nous, dit-il, papa veut te parler.

- Je n’ose pas.

- Pourquoi ?... Il ne te fera pas de mal.

- C’est pas sûr… Il est gendarme, n’est-ce pas ?

- Oui, mais tu n’as rien à craindre de lui… Au contraire, il dit qu’on te doit de l’argent parce que tu m’as retiré de l’eau.

- Qui c’est qui me doit de l’argent ?

- Je crois que c’est M. le maire. Il parait que cette récompense-là s’appelle une prime de sauvetage.

- Combien que c’est ?

- Je n’en sais rien.

- Je veux bien recevoir l’argent mais tu me l’apporteras toi-même.

- Oh ! ça ne se peut pas, mon vieux. On voit bien que tu ne connais pas les affaires. Papa m’a expliqué qu’on va faire un procès-verbal pour raconter la belle action, puis qu’on mettra sur le papier ton nom et ceux de tes parents.

Le visage du gamin se rembrunit et, sans une parole, il s’enfuit.

Très intrigué, Marcel rentra en hâte à la gendarmerie où il conta son entretien avec le vagabond.

- Ce doit être le vils du vannier ambulant, dit M. Perquin. Les gens de cette sorte ont toujours peur des gendarmes. On a dû recommander à l’enfant de nous éviter afin de ne fournir aucun renseignement. S’il en est ainsi, j’irai à la roulotte avec un collègue pour interroger ces nomades suspects.

Cette conversation avait lieu dans le jardin. Le bruit de la grille qu’on entr’ouvrait attira l’attention de Marcel qui s’écria :

- Le voilà !...

Mais le visiteur, plus disposé à reculer qu’à avancer, fit signe à son camarade de s’approcher.

- On m’a permis de venir, murmura-t-il… Je n’ose pas entrer.

- Que tu es bête ! s’exclame l’ex-noyé en manière de bienvenue, papa ne va pas te manger.

- Mon fils a raison, dit le gendarme en refermant la grille. Viens goûter avec lui. Tu verras que je ne suis pas méchant.

- Vous ne me mettrez pas en prison, bien vrai ?

- Tu n’as rien fait de mal, riposta Marcel qui entraîna son nouvel ami à la fontaine pour les ablutions nécessaires avant la collation.

Mme Perquin fit fête au convive qui, mieux débarbouillé qu’à l’ordinaire, était vraiment gentil, malgré son teint hâlé, car il avait de grands yeux gris dont l’effarement s’était changé en gaîté à l’aspect du repas préparé.

Certes le gendarme n’avait pas renoncé à questionner l’hôte inattendu, mais il voulait l’apprivoiser d’abord et comptait sur l’enjouement de Marcel pour accomplir cette tâche.

Bientôt l’invité déclara entre deux bouchées qu’il s’appelait Pierre Embrun, était orphelin et vivait avec son oncle et sa tante, vanniers ambulants.

- Ils ne t’envoient pas souvent à l’école, observa M. Perquin.

- C’est difficile. On voyage tout le temps.

La porte de la salle à manger s’ouvrit et quelqu’un qu’on n’avait pas entendu monter, entra.

- Votre noyé me paraît en bonne santé, dit-il. [Fin colonne 3]

 

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[Fin page 4]

 

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- Comme vous voyez, répliqua l’heureuse maman.

Pendant que le docteur serrait des mains amies, le convive s’était levé comme tout le monde et se tenait à l’écart sans qu’on fît attention à lui. Soudain les regards du médecin rencontrant ceux de l’enfant, un cri de joie retentit :

- Papa !

Se jetant au cou du pauvre père ahuri, l’enfant l’étreignit de toutes ses forces.

M. Mérignon avait chancelé sous le choc. Il se dégagea rapidement et, tenant le vagabond à distance par les épaules, il l’examina en silence avec calme, se refusant à comprendre, croyant à une méprise, ne reconnaissant plus son fils.

- Comment t’appelles-tu ? demanda-t-il enfin.

- Albert Mérignon.

- Tu viens de nous dire Pierre Embrun ! s’exclama le gendarme.

- C’est le nom qu’on m’a donné… Ce n’est pas le mien… Oh ! papa !... Où est maman ?

La voix était celle d’Albert, plus grave cependant.

- Tu la verras bientôt dit le père ému. Mon pauvre chéri, que t’est-il arrivé ?... Quels sont les misérables qui t’ont gardé loin de nous ?... Comment es-tu devenu un mendiant ?

- Je vais te le raconter, papa.

- Eh bien ! non… Ne me dis rien… Viens embrasser ta mère d’abord.

Mme Perquin s’interposa.

- Oh ! docteur ! s’écria-t-elle. Ne craignez-vous pas que l’émotion ne soit trop forte pour Mme Mérignon. Ne vaudrait-il pas mieux la préparer à l’entrevue ?

- C’est inutile. Elle n’a jamais cru que son fils fût noyé… Elle était persuadé qu’on l’avait enlevé…

[Fin colonne 1]

 

 

Les circonstances lui ont donné raison… Merci, mes amis, nous reviendrons ici ensemble.

Gentiment Albert tendit la main à Marcel, presque aussi heureux que lui, mais plus loquace, et qui lui dit en l’accompagnant jusqu’à la porte.

 

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- Tu vois, mon vieux… Ca t’a porté bonheur de me sauver la vie. Tu as retrouvé tes parents.

Une heure plus tard, Embrun, arrêté par deux gendarmes et conduit au commissariat, s’y rencontrait avec le docteur Mérignon. [Fin colonne 2]

 

Là on s’expliqua. Le commerçant ambulant raconta ce qu’il savait.

Son frère, qu’il voyait rarement et qui dirigeait un théâtre forain, était mort quatre ans auparavant après l’avoir prié de prendre soin d’un enfant adoptif. Ce petit garçon avait été trouvé errant sur le bord de la Seine, à Poissy, à la recherche de son chapeau enlevé par le vent.

- Je reconnais, ajouta le vannier, que j’aurais dû remettre l’enfant à la police, mais je venais de subir un mois de prison pour maraudage et je craignais d’être soupçonné de rapt. Ma femme m’a conseillé de garder le petit qui pouvait nous être utile et de le faire passer pour notre neveu. En réalité, il ne nous a guère rendu service car il n’aimait ni faire la vannerie ni la vendre. Nous ne l’avons pas gâté, c’est vrai, mais nous ne l’avons pas maltraité non plus. Il a toujours mangé à sa faim. S’il a retrouvé sa famille, tant mieux pour lui.

On ne put tirer de cet homme d’autres détails. Il partit, promettant de revenir le lendemain pour être confronté à Albert et remerciant le médecin qui refusait de porter plainte contre lui.

M. Mérignon se proposait même de remettre une somme convenable à celui qui, ayant à tort gardé l’enfant, l’avait néanmoins nourri et logé pendant quatre ans.

Mais le lendemain, il ne vint point au rendez-vous. Les vanniers avaient disparu pendant la nuit, renonçant à la compensation promise. On apprit bientôt que plusieurs vols, commis dans la région, leur étaient attribués. Ce fut l’explication de leur fuite.

Ces évènements impressionnèrent beaucoup Marcel Perquin. Il évita désormais de se promener seul au bord de l’eau où l’on peut se noyer et où l’on peut aussi rencontrer des gens capables des plus mauvaises actions.

Maxime de Méria.

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Il est au bout de la Camargue, à la pointe du « désert de sel », à 37 kilomètres d’Arles, un village pittoresque qu’on a nommé les Saintes-Maries-de-la-Mer. Il s’y élève une belle et curieuse église du XIIe siècle au culte de laquelle se rattache une fort originale légende, celle des trois Maries.

L’église des Saintes-Maries fut élevée, dit-on, au point où les saintes femmes de l’Evangile, Marie Jacobé, Marie Salomé, et Marie Magdeleine, accompagnées de leurs servante Sara, abordèrent, après la mort du Christ, portées par un bateau qui n’avait ni voiles ni rames. Chassées par les Juifs qui persécutaient les disciples de Jésus, elles durent monter sur une barque désemparées ; mais le ciel les protégeait, et leur esquif poussé par un ange, aborda sur les côtes de Provence. Les trois Maries évangélisèrent par la suite toute la province et

 

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et furent ensevelies aux lieux mêmes où elles avaient abordé miraculeusement.

Plus tard, au XVe siècle, lorsque le bon roi René voulant élever un tombeau somptueux aux saints, fit fouiller la terre pour exhumer leurs restes, on en retira seulement quelques ossements dont s’exhala un parfum merveilleux.

Au culte des trois Maries se rattachent les curieuses croyances des Romains. Aussi chaque année, à l’occasion des deux grands pèlerinages qui ont lieu à l’église des saintes, les Bohémiens de France, et même d’Espagne et d’Italie, viennent se réunir en une foule bigarrée, colorée et éclatante sous le soleil, de l’aspect le plus pittoresque. Chaque pèlerinage est suivi de réjouissances locales telles que des courses de taureaux, de farades, de farandoles, etc., et constitue un spectacle unique.

C’est dans cet admirable cadre que Mistral a fait mourir son héroïne Mireille « face à la mer » et que le grand musicien Gounod vint chercher l’inspiration.

Eh bien ! cette merveille de notre pays, les Saintes-Maries sont destinées à disparaître. La mer les mange.

On avait cru que cela tenait à un simple fléchissement du terrain, mais il n’en est rien et une simple digue pourrait enrayer le mal, et, de hautes personnalités [Fin colonne 1]

 

l’affirment, il suffirait de quelques crédits pour sauver les Saintes-Maries qui sont une des plus belles choses de France et un nid de souvenirs.

 

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Le titre de roi octroyant la toute-puissance, la foule s’imagine volontiers les monarques comme étant doués d’un physique en rapport avec leur situation. Leur majesté s’accompagne ainsi, dans l’esprit populaire, d’une haute stature, d’une carrure imposante reposant sur des bases solides, et de mains puissantes tenant fermement le sceptre et l’épée. Charlemagne, dans les temps jadis, réalisa ce type parfait du souverain qu’incarna à merveille de nos jours le roi Oscar de Suède. De cette conception sortirent, du reste, diverses expressions de droit, de poids ou de mesure, telles que : main de roi, poids de roi, pied de roi.

 

 

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Les pauvres de l’Hindoustan, plus que personne, doivent partager cette manière de voir, aussi durent-ils trouver Sa Majesté Georges V, roi d’Angleterre et empereur des Indes, lors du Durban de Delhi, beaucoup trop maigre et moins royal que son père Edouard VII.

Il existe en effet aux Indes une coutume fort curieuse et remontant à la plus lointaine antiquité, qui consiste à distribuer aux pauvres de la colonie le poids en or ou en argent du souverain nouvellement élu.

C’est ainsi que dans une cérémonie qui eut lieu à Calcutta, et coûta près d’un demi-million de francs, le roi George V dut se placer sur le plateau d’une balance que l’on équilibra en mettant dans l’autre plateau des lingots d’or, puis d’argent, de façon à fixer ces diverses valeurs métalliques qui furent ensuite converties en monnaies et distribuées sous cette forme aux indigents.

Par bonheur pour les contribuables français, cette coutume ne s’est pas établie chez nous, car s’il fallait distribuer dans chacune de nos colonies le poids de notre président, il y a fort à penser que le budget de l’Elysée n’y suffirait pas. [Fin colonne 2]

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… et de faire le plus long trajet par la voie de terre, bien que les forêts fussent aussi mal fréquentées que la mer. Ils louèrent un guide, et quelques-uns de ces bœufs de selle et de trait, appelés zébus, dont se servent les Asiatiques. Un soir qu’ils campaient tranquillement…

 

 

 

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… des naturels du pays, qui chassaient aux environs, les découvrirent et les attaquèrent. Pendant que les deux Européens se défendaient, leur guide s’enfuyait avec les bêtes, dans la nuit, ce qui augmenta la rage des assaillants. Bientôt Hector et le négociant furent désarmés…

 

 

 

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Mais le comédien, toujours avisé, n’avait pas lâché sa boîte aux accessoires. On les mena au camp de ces sauvages, qui étaient trapus, cuivrés, et vivaient de rapines. Ils firent venir leur chef, et tous délibérèrent dans une langue inconnue sur le sort de leur prise…

 

 

 

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Après quoi, il s jetèrent sur les captifs des regards empreints d’une joie cruelle, et les sorciers se mirent à danser et à chanter d’une voix glapissante. Saisi d’une nouvelle idée, Hector profita d’une accalmie pour entrer dans leur cercle…

 

 

 

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… et il chanta du mieux qu’il put les meilleures chansons de son répertoire. D’abord surpris, les auditeurs se rapprochèrent, approuvèrent du geste, et se montrèrent enfin si charmés, qu’ils décidèrent entre eux de laisser les prisonniers aller et venir dans leur camp.

 

 

 

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C’était déjà une chance d’évasion due à l’art du comédien, mais ce n’était pas suffisant. En effet, si les insulaires lui témoignaient des égards, ils traitaient fort mal le pauvre négociant, et il était évident qu’ils avaient décidé sa mort pour un jour très proche.

 

 

 

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« - Cette fois, lui dit Hector, mes accessoires vont nous tirer d’affaire. Feignons une grande animosité l’un contre l’autre, injurions-nous, battons-nous. » La scène eut lieu, en effet, à la nuit tombante. Après mille injures, Hector saisit un poignard dont il fit briller la lame…

 

 

 

 

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… et l’enfonça jusqu’à la poignée dans le corps du marchand. Celui-ci tomba, noyé de sang, et les naturels présents applaudirent. Ils aidèrent même Hector à transporter son compagnon dans un petit bois hors du camp, où ils abandonnaient leurs morts.

 

 

 

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Aussitôt qu’il se vit seul, M. Léonard se leva prestement, et se débarrassa de la poche pleine de couleur rouge cachée sous ses habits, se félicitant que le comédien eut emporté avec lui une de ces armes de théâtre dont la lame rentre dans la poignée. Il gagna ensuite la côte.

 

 

 

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Tranquillisé sur le sort de son compagnon, Hector attendit l’occasion de dérober un manteau du pays, et s’étant badigeonné de jaune, il se fit si bien la tête de ses gardiens, qu’ils le virent franchir l’enceinte de leur camp sans aucun soupçon. Il rejoignit le marchand.

 

 

 

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Et comme ces parages étaient assez fréquentés par les bâtiments levantins, ils purent, à l’aide de signaux attirer l’attention de l’un d’eux, qui les emmena enfin au lieu où ils désiraient aller. Ils eurent la joie d’y trouver leur fidèle guide avec sa caravane…

 

 

 

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… qui les attendait, confiant en la valeur et l’habileté des Européens. Pleins de reconnaissance pour Hector, le négociant lui offrit de quoi retourner en France reprendre son art, et lui donna une si forte part de son entreprise, qu’il put bientôt monter lui-même un théâtre.

 

 

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Tourton est un brave artilleur, tout frais arrivé de sa campagne. Il est depuis quelques mois seulement au régiment, lorsque le colonel réunit ses hommes dans la cour de la caserne pour féliciter publiquement l’un d’eux qui a courageusement arrêté un cheval emballé. Tout remué par les vibrantes paroles de son chef, Tourton se jure lui-même de se distinguer par un acte d’héroïsme à la première occasion.

 

 

 

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C’est animé de ces dispositions qu’il sort en ville le dimanche suivant. L’œil aux aguets, il épie tous les incidents de la rue, cherchant le moment propice pour se manifester. Comme par un fait exprès, tout est calme, les chevaux eux-mêmes semblent s’être donné le mot pour être d’une douceur incomparable.

 

 

 

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« Oh ! oh ! mais voici qui peut devenir intéressant : ces deux individus tapis à l’encoignure de cette maison me semblent méditer un mauvais coup. Tourton, mon ami, il faut surveiller cela en alliant la prudence de la panthère à l’habileté du renard. Avançons subrepticement suivant les règles de la tactique militaire et partons en reconnaissance. Sapristi, mon flair d’artilleur ne m’a pas trompé, y en a qu’a dit à l’autre :

 

 

 

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« - Dès que la porte s’ouvrira, on lui tombera « dessus ». sur que c’est un guêt-à-panse et que ces gens-là sont incontinent bourrés de noirs desseins. Attention, Tourton, v’là la porte qui s’ouvre et les deux bandits s’apprêtent à bondir sur leur victime.

 

 

 

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… Première batterie, feu ! et pan et pan, attrape mon colon, t’as beau crier, rends-toi, ou je tire à mitraille. » Surpris par cette attaque imprévue, l’un des deux hommes roule à terre, mais son compagnon a le temps de se précipiter sur l’individu qui vient de sortir. L’artilleur a cependant affaire à forte partie, il sent que si la lutte continue, il va avoir le dessous. Heureusement, des agents attirés par ses cris arrivent au pas de course.

 

 

 

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Ah ! mais c’est trop fort, sur un mot que les bandits viennent de leur dire à voix basse, voici les représentants de l’autorité qui se précipitent sur Tourton, et sans le moindre ménagement lui passent les menottes. « - Il y a erreur ! » crie le militaire. « - Silence, ou je cogne, espèce d’apache, » répond le sergent de ville. Médusé, ahuri, Tourton, enchainé avec l’homme qu’il voulait délivrer des griffes de ses assaillants, se laisse conduire au poste de police.

 

 

 

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Le voici devant le commissaire. Enfin il va pouvoir se disculper et recevoir les éloges qui lui sont bien dus pour sa belle action. Ah ! bien oui, le sévère magistrat veut à toute force le fourrer en prison, pour coups et blessures portés aux agents de la force publique, car ceux qu’il avait pris pour des malandrins, étaient en réalité des agents de la sûreté, chargés d’arrêter un dangereux malfaiteur. L’intervention de Tourton avait même failli empêcher l’arrestation de ce dernier. A la fin, convaincu de la bonne foi du troupier, le commissaire voulut bien le remettre en liberté.

 

 

 

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Mais Tourton est désespéré. Qu’est-ce que va penser le colonel de cette histoire ? Dans le fond, il va peut-être le soupçonner d’être un soldat apache. Quelle sale affaire ! Il n’y a pas, il faut faire un coup d’éclat pour racheter cette abominable gaité. « Tiens, mais pourquoi cette foule sur les ponts et les quais de la Seine ? Une noyage, peut-être ! » L’artilleur parvient au parapet juste à temps pour apercevoir un homme qui se débat dans l’eau.

 

 

 

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Comme dans un éclair, Tourton voit en imagination la cour de la caserne, tout illuminée de soleil. La musique, le colonel, tout le régiment est là, et lui, Tourton, au centre de la cour, s’avance vers les officiers pour recevoir la médaille de sauvetage. Comme hypnotisé par cette vision, il se jette sans hésiter dans le fleuve pour repêcher le noyé

 

 

 

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Comme il est bon nageur, il a la joie de rattraper en quelques brasses la victime de l’accident, dont la tête émerge seule. Il va le saisir, déjà il tient une jambe, mais quoi, l’autre se débat violemment en vociférant. Le soldat n’y comprend goutte, car son noyé parle anglais, mais il est manifeste cependant que ce dernier est furieux. « Bon, pense Tourton, c’est un particulier qui veut se suicider. Mais moi, ce représentant de l’armée française, je suis là pour le [Texte manquant]

 

 

 

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Bon gré, mal gré, il ramène son homme sur la berge. Puis dans une attitude à la fois héroïque et modeste, il attend les félicitations. Justement, voici un groupe de messieurs en redingote qui s’avancent au plus vite vers lui. Aïe, aïe, quel concert : « - Idiot, crétin, abruti, » telles sont les douces paroles qui lui sont d’abord adressées. Vaguement inquiet, Tourton commence à se demander s’il n’a pas encore commis une nouvelle gaffe. Hélas ! oui, et quelle gaffe ! il vient tout bonnement d’interrompre [Texte manquant]

 

 

 

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… en arrêtant l’Anglais Crampton, champion du monde, au moment où il allait battre tous les records. Immédiatement Tourton est reconduit à la caserne sous bonne escorte. Mais il expose si naïvement son cas au colonel que ce dernier doit se mordre la moustache pour ne pas éclater de rire. Toutefois, il sermonne vertement le soldat et lui enjoint de ne plus oublier à l’avenir que la bonne volonté ne suffit pas et qu’il faut toujours réfléchir avant d’agir.

9 septembre 2012

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Ah que coucou !

 

Aujourd’hui, une fois n’est pas coutume et comme promis hier, je poste l’Illustré complet qui est paru le 15 septembre 1912…

 

Evidemment, je ne vais pas faire une présentation pour chacune des pages ;)… tout comme, je ne vais pas à nouveau répéter comment s’y prendre pour refaire les pages parce que c’est comme pour le numéro précédent, tout comme les dimensions de l’illustré sont comme le numéro précédent…

 

Donc je n’ajoute que les images et les textes pour que vous puissiez, à votre tour, reconstruire ce numéro…

 

Bisous,

@+

Sab

 

 

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Hector était un pauvre comédien qui ne parvenait pas à gagner sa vie, malgré un réel talent. Lassé de la misère, il accepta le premier emploi qu’un ami lui procura ; un négociant, M. Léonard, s’embarquait pour les ports asiatiques et avait besoin d’un commis…

 

 

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Ne perdant pas l’espoir de reprendre un jour son art, Hector emporta précieusement sa boîte de fards et d’accessoires, ne prévoyant pas quels services elle allait leur rendre à tous deux. Ils firent sans incidents une longue traversée monotone…

 

 

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… et arrivèrent dans un port où M. Léonard devait fréter une saïque (bateau levantin) pour transporter sa petite cargaison à destination. On les prévint alors que des pillards indochinois et malais sillonnaient l’océan Indien et qu’ils eussent à s’en garer.

 

 

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Le négociant prit cet avertissement si peu au sérieux, qu’il négligea de s’armer. Hector était plus inquiet et il avait raison car, une fois au large, le petit bâtiment fut accosté par une jonque pillarde montée par des gaillards jaunes, à figure patibulaire.

 

 

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Ils transbordèrent sur leur bateau les deux Européens et les colis, et laissèrent aller les matelots malais qui composaient l’équipage : Hector, qui avait son idée, s’efforça de ne pas laisser voir son visage, et comme il faisait sombre, il y réussit parfaitement.

 

 

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Il avait pu conserver sous son manteau la boîte aux fards. On descendit les captifs à fond de cale, et on leur mit les fers aux pieds. N’étant pas surveillés, Hector put se grimer à son aise, et quand un pirate vint leur apporter à manger, il vit d’abord M. Léonard…

 

 

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… puis un vieillard décrépit et courbé, qui le supplia de lui ôter ses fers, étant trop faible pour les supporter. Le capitaine, consulté, le permit. Il avait du reste l’intention de conserver ses prisonniers afin de les rançonner lorsqu’ils seraient à terre.

 

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Hector, délivré de ses fers, se mit à rôder sur le pont, toussotant, marmottant et branlant la tête. Il observait sans relâche et, sachant un peu d’espagnol et d’anglais, il saisissait bien des mots du dialecte des pillards. Il apprit ainsi que le navire était poursuivi par un garde-côte.

 

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En effet, une voile lointaine semblait lui donner la chasse, mais confiants en leur avance et en leur vitesse, les marins ne s’abstinrent pas de s’enivrer, une nuit, dans la cabine, ne laissant sur le pont que l’homme de quart et le pilote. Hector profita de cette occasion.

 

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Ayant dérobé des outils – car on ne surveillait guère ce vieillard inoffensif et quasi aveugle – Hector alla délivrer son compagnon. Ils rampèrent le long du bordage, saisirent le pilote, le garrottèrent et le bâillonnèrent puis changèrent la direction du bateau.

 

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La jonque, au lieu de fuir, fit un demi-cercle et se mit à courir latéralement, ce qui la rapprochait du navire poursuivant. Pendant ce temps, M. Léonard réduit l’homme de quart à l’impuissance. Peu après, un premier coup de canon trouait la coque du bateau vide.

 

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Les marins ivres montèrent en désordre sur le pont, mais Hector avait déjà lancé à la mer tout ce qu’il avait trouvé d’armes. L’abordage eut lieu ; on captura les pillards et les deux étrangers furent ramenés dans le port le plus proche. Ils décidèrent cette fois de bien s’armer…

 

(Voir la suite page 2).

7 septembre 2012

Colette : Dialogues de Bêtes

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Ah que coucou !

 

Suite à la demande permanente de Sabine, je vous propose aujourd’hui le livre suivant :

 

Dialogues de Bêtes

Accessible au téléchargement et/ou à la lecture, en cliquant ici

Format : pdf

(logiciel fourni gratuitement par Adobe)

Langue : Français

 

Comme vous vous en apercevrez, je n’ai pas mis la date de la sortie de cette œuvre, car même si il est vrai qu’elle a été écrite en 1904, il se trouve dans cet ouvrage certaines histoires qu’on ne peut dater de ces premières années du 20e siècle mais des années de la première Guerre Mondiale (et même après, que Colette – ou son éditeur - a ajouté à son œuvre initiale)… Je préfère donc ne pas mentionner de date plutôt qu’une année dont le lecteur peut tout de suite s’apercevoir qu’elle est erronée ;)… oui, il suffit simplement de savoir quel était l’uniforme de l’armée française pendant ces années de guerre…

 

Concernant cette œuvre, je dirais qu’elle se découpe en 2 parties distinctes.

 

Dans la première nous faisons la connaissance de Toby-Chien et de Kiki-la-Doucette (qui, contrairement à ce que son nom nous indique, est un chat). Tous deux discutent de la vie simple qu’ils mènent chez leurs « Deux-Pattes » : Elle & Lui. Etres étranges, difficiles à comprendre pour ces deux animaux domestiques, qui sont souvent étonnés par leur comportement… car, OUI, comment se fait-il que Lui n’accourt pas au moindre appel de Kiki-la-Doucette en n’admirant pas, de façon permanente, sa beauté, son élégance et préférant souvent « gratter le papier » au lieu de le choyer et de lui laisser faire tout ce qu’il veut ? Pourquoi punit-Elle Toby-Chien alors qu’il est fou d’amour pour sa maîtresse ? ou lui fait-Elle 1001 misères, comme de lui faire avaler des médicaments ou de lui faire prendre son bain ?

 

Dans la seconde partie sont certainement regroupées celles qui ont été ajoutées car nous sentons que nous ne sommes plus dans la même ambiance : les animaux ont changé, ainsi qu’Elle et Lui… Cette partie je la décompose de ces 3 « nouvelles » : La Chienne (qui accueille son maître sergent et lui montre comment son amante s’est comportée pendant sa longue absence), Celle qui en revient (qui nous parle d’une chienne traumatisée qui a été utilisée pendant la guerre pour effectuer certaines tâches, et qui décrit, dans son sommeil, aux autres animaux de la maison, comment elle a sauvé le Maître au risque de sa vie) et Les Bêtes et la Tortue, qui somme toute, nous rappelle que nos animaux domestiques sont souvent pleins de surprises et très amusants ;)…

 

Bonne lecture !

 

Bisous,

@+

Sab

5 septembre 2012

Mythes et légendes de la Grèce Antique : Fondation de Thèbes

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Illustration réalisée par :

Zdeněk Sklenář

 

Ah que coucou !

 

« Fondation de Thèbes »… de quelle ville s’agit-il ? de la Thèbes égyptienne qui est devenue Louxor ? ou de la Thèbes grecque ? En effet, malgré que Eduard Petiška nous narre les mythes et légendes de la Grèce antique, nous pouvons avoir ici un doute car nous savons tous qu’à dater d’Alexandre le Grand, les pharaons d’Egypte étaient grecs…

 

 

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(pour savoir où Thèbes se trouve,

cliquez sur la carte ci-dessus

et vous apercevrez Thèbes entourée en rouge)

 

Et bien, il s’agit là bien de la Thèbes grecque dont nous allons connaître aujourd’hui la légende…

 

La Fondation de Thèbes

 

 

Il y avait une fois un roi nommé Agénor, qui régnait sur la cité phénicienne de Sidon. Sa fille Europe était réputée pour sa beauté dans le monde entier, non seulement chez les hommes mais aussi chez les dieux. Zeus lui-même, le roi des dieux, en tomba amoureux.

Un jour, tôt le matin, la ravissante Europe partit en promenade avec ses suivantes à travers les prés fleuris qui bordaient la mer. Les jeunes filles ramassèrent des fleurs, puis elles s’assirent à l’ombre des arbres pour tresser des couronnes. Lorsqu’elles levèrent les yeux de leur travail, elles poussèrent un cri de surprise : un magnifique taureau, d’une blancheur éblouissante, paré de petites cornes limpides comme du cristal, les regardait.

Il avait un air si doux que bientôt Europe et ses compagnes oublièrent leur frayeur. La princesse lui tendit un gros bouquet tandis qu’on ornait ses cornes de guirlandes.

Le taureau gambada sur ses sabots brillants, baissant le cou et s’agenouillant devant la jeune beauté comme pour l’inviter à monter sur son dos. En riant, elle enfourcha l’étrange animal et invita ses suivantes à faire de même.

Mais le taureau ne les attendit pas, il se leva et, emportant Europe, alla droit dans la mer.

Europe, terrifiée, gémit et pleura mais cela ne la sauva pas. Sa monture gagnait le large et bientôt elle ne vit plus la côte ni les jeunes filles qui criaient. Il n’y avait autour d’elle que la mer.

Le soleil se coucha, les premières étoiles s’allumèrent dans le ciel, se reflétant dans la mer, et le taureau nageait toujours avec sa proie sur le dos. Dans l’obscurité apparut l’ombre d’une côte inconnue. La bête gagna la terre, il déposa doucement sa captive sur l’herbe et disparut.

La déesse de l’amour, Aphrodite, sortit alors des chaudes ténèbres de la nuit et la consola :

« N’aie crainte », lui dit-elle avec douceur, « il ne te sera fait aucun mal. Zeus, roi des dieux, s’est changé en taureau pour t’enlever, car il est amoureux de toi. Ton nom sera immortalisé : la terre qui t’accueille le portera ».

C’est ainsi qu’Europe vécut avec Zeus, cachée dans une contré lointaine. Son père, le roi Agénor, la pleura beaucoup. Il envoya des messagers pour tenter d’avoir des nouvelles de la princesse disparue, mais en vain. Personne ne lui donna le moindre espoir.

Alors il appela son fils Cadmos.

« Va, » lui dit-il, « retrouve ta sœur et ramène-la moi ; cherche dans le monde entier et apaise mon chagrin : ne reviens pas sans elle ! »

Le prince convoqua ses plus braves guerriers, choisit ceux qui l’accompagneraient et se mit en route à la recherche de la jeune fille.

Il erra dans les pays connus, dans ceux qui l’étaient moins et même dans ceux qui lui étaient tout à fait étrangers. Tout le long du chemin, il interrogea les gens mais personne n’avait vu Europe. Il traversa beaucoup de frontières, passa à gué beaucoup de rivières, mais en vain.

Un jour, Cadmos et ses compagnons perdirent leur chemin et se retrouvèrent sur une étrange route. Ils la suivirent et, longtemps après, rencontrèrent un voyageur. Ils lui demandèrent où menait le chemin et apprirent que c’était celui de Delphes.

« Je vois que vous venez de loin, » dit l’homme. « Peut-être cherchez-vous l’aventure, peut-être recherchez-vous quelqu’un. Qu’importe, lorsque vous arriverez à Delphes, prenez conseil de l’oracle. Ce sont peut-être les dieux eux-mêmes qui vous ont montré cette voie. »

Cadmos se réjouit. Il avait entendu parler de Delphes depuis longtemps. La Pythie, prêtresse d’Apollon, siégeait sur un grand trépied au-dessus d’une crevasse de la montagne. Elle respirait les émanations venant du gouffre, puis, intoxiquée par la fumée, criait des prédictions obscures qu’un prêtre rassemblait et interprétait pour ceux qui étaient venu prier l’oracle.

Cadmos remercia le voyageur et poursuivit son chemin. Lorsqu’il arriva à destination, il questionna la diseuse d’augures et obtint cette réponse :

« Ne cherche pas ta sœur et ne retourne pas chez toi. Tu rencontreras une génisse qui n’a jamais connu le joug dans une prairie isolée. Suis-la. A l’endroit où elle s’arrêtera pour se reposer, fonde une ville et nomme-la Thèbes. »

Cadmos s’inclina devant la volonté des dieux. Il chercha avec ses compagnons le pâturage évoqué par la prêtresse. Il le trouva bientôt, ainsi que la jeune vache qui broutait l’herbe gorgé de sève. A sa suite ils traversèrent un torrent et de larges plaines.

Enfin elle s’arrêta, jeta un regard au prince et à sa troupe, leva la tête et poussa un long meuglement. Lorsque la génisse se fut lentement couchée, le jeune héros tomba à genoux et embrassa avec ferveur cette terre étrangère qui était devenue la sienne. Puis il envoya ses guerriers à la recherche d’eau de source pour faire un sacrifice.

La forêt dans laquelle ils venaient de pénétrer n’avait encore jamais connu le tranchant de la hache. Aussi durent-ils se frayer un chemin à travers les buissons en suivant le murmure de la rivière.

Soudain une source, abondante et limpide, jaillit d’un rocher, sautant sur les pierres humides et donnant une agréable sensation de fraîcheur. Ils s’agenouillèrent pour recueillir le précieux liquide.

Tout à coup, un épouvantable fracas se fit entendre, provenant d’une grotte dissimulée dans le roc, Le taillis s’ouvrit devant un gigantesque dragon recouvert d’écailles, avec une crête ensanglantée qui se dressait de sa tête à sa queue. Les yeux du monstre jetaient des flammes et l’animal tout entier semblait l’incarnation du mal.

Il ouvrit grand ses mâchoires, découvrant trois langues énormes et trois rangées de dents, puis il cracha dans leur direction son haleine pestilentielle. Ceux qui survécurent, il les écrasa de son corps et les lacéra de ses griffes.

Le soleil atteignait le zénith et raccourcissait ses ombres, mais les compagnons de Cadmos ne revenaient pas. Cadmos s’inquiéta alors de leur absence. Il craignit qu’un sort malheureux se soit abattu sur eux, aussi prit-il son glaive et sa lance pour partir à leur recherche. Il trouva le sentier pratiqué à travers le taillis et atteignit le rocher où naissait la source. C’était là que gisaient ses camarades, massacrés par le terrible dragon qui secouait sa fête de façon menaçante au-dessus de leurs corps inertes.

Le jeune héros regarda courageusement les yeux injectés de sang du dragon et s’écria :

« Mes fidèles amis, je serai votre vengeur ou votre compagnon dans la mort ! »

Il se baissa, ramassa un énorme fragment de roche et le jeta sur le monstre. Un tel coup aurait sûrement fracassé la plus solide des murailles, pourtant elle ne fit aucun mal au dragon : le rocher glissa sur sa carapace d’écailles et ne fit qu’accroître sa fureur. Il se cabra contre son adversaire, mais Cadmos le piqua de sa lance, qu’il parvint à faire pénétrer sous sa peau. L’animal tourna la tête, mordit la lance et la cassa.

Mais il ne put en retirer la pointe, solidement plantée dans sa chair. Fou de douleur, le dragon attaqua à nouveau son ennemi. Il ouvrit la gueule pour tenter de tuer le héros de son souffle empoisonné.

Ayant percé ses intentions, le jeune homme se cacha précipitamment derrière un gros arbre. Il prit une autre lance et l’expédia dans la gorge de l’animal avec une telle force qu’il cloua le monstre à un chêne voisin. Celui-ci parvint en se secouant à déraciner l’arbre, le sang se mit à gicler de sa gueule et en un instant l’herbe, la mousse et les feuilles, tout devint rouge.

En agonisant, il écrasa de sa queue, qui battait de droite et de gauche, quelques buisons, puis ce fut le silence.

Pendant que, plein d’étonnement, Cadmos examinait le gigantesque cadavre, la déesse Pallas Athéna descendit du ciel.

« Sème les dents du dragon », lui ordonna-t-elle.

Le héros retourna la terre avec sa lance et planta dans les sillons les trois horribles mâchoires de la bête.

Soudain les mottes de terre se mirent à bouger et l’argile fut percée par des glaives, des lances, des casques, des têtes, des cous, des poitrines et des bras brandissant des armes. Toute la plaine se remplit de guerriers.

Cadmos, effrayé par ce cortège armé, saisit son glaive lorsqu’un des guerriers l’interpella :

« Ne te mêle pas de notre combat. Il ne te concerne pas ». Et, se jetant sur son plus proche voisin, il le transperça d’un coup de lance.

La bataille s’engagea sous les yeux de notre héros. Ce fut l’inévitable massacre. Pouvait-il en être autrement alors qu’ils étaient nés des dents du dragon, fils d’Arès, dieu de la guerre ?

La plaine était jonchée de cadavres. Il n’y eut que cinq survivants dans cette multitude et ils firent la paix. Ils étaient forts et braves car ils avaient défendu leurs vies dans un combat.

C’est avec eux que Cadmos fonda la ville de Thèbes.

 

Que nous enseigne cette légende ? la véritable histoire de la fondation de Thèbes ;) ?

 

Nous savons tous qu’une légende est faite pour enjoliver la vérité… pour laisser croire au Thébains qu’ils étaient tous des descendants de valeureux guerriers qui avaient la force d’un dragon (vu qu’ils sont nés de la mâchoire du dragon), mais qu’ils n’ont pas tous des liens de parentés avec Cadmos, le prince fondateur… Cette légende nous apprend aussi pourquoi nous nous trouvons aujourd’hui sur un continent nommé « Europe » ;)… car nous sommes sur la terre où la princesse Europe, kidnappée par Zeus, a été mené et où elle a vécu jusqu’à sa mort…

Certains pourrait confirmer que cette image du taureau, au temps des Grecs anciens, personnifiait la virilité – il est donc logique que Zeus se soit transformé en taureau… et que seule la princesse l’ait « enfourché »… mais cette image est-elle l’ancêtre de celle d’un prince charmant et son destrier blanc qui vient sauver une princesse ? il faudra y réfléchir ;)…

 

Dans un sens il s’agit là de deux belles histoires… dommage qu’elles ne soient pas réelles ;)… car la réalité est moins… comment dire ??? moins enjolivée.

 

Bisous,

@+

Sab

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3 septembre 2012

Edgar Allan Poe : Scarabée d’or

Edgar Allan 

Poe

 

Ah que coucou !

 

Allez, une petite nouvelle traduite par notre Charles Baudelaire national pour remettre nos neurones en mode « MARCHE »…

 

Je vous propose donc la nouvelle suivante tirée du livre Les Histoires extraordinaires :

 

Le Scarabée d’or

Accès au téléchargement et/ou à la lecture en cliquant ici

Format : pdf

(logiciel fourni gratuitement par Adobe)

Langue : Français

 

Serez-vous capable de résoudre l’énigme et de trouver le code sans l’aide de Legrand ?

Legrand, ce mauvais dessinateur réputé, qui dessine sur un parchemin un scarabée reconnu par son visiteur comme étant un crâne de mort… Legrand, ce fou réputé, qui se serait fait mordre à la tête par le scarabée d’après les dires de son serviteur Jupiter… Legrand, ce génial, qui réussit, malgré les sarcasmes, a découvrir le fabuleux trésor du pirate Kidd qui était caché depuis plusieurs siècles…

Mais Legrand a-t-il réellement découvert toutes les réponses à cette formidable énigme ? Ne reste-t-il pas des questions restées « sans réponse » ? Vous le découvrirez en lisant ces quelques pages…

 

Bisous,

@+

Sab

1 septembre 2012

8 septembre 1912 : Page 12 (3/3)

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Il y avait autrefois, dans les armées du Roy, un vaillant capitaine qui s’appelait Colin Maillard. Toujours le premier aux assauts et dans les combats, il s’était fait une réputation de bravoure qui était devenue légendaire.

 

 

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Or, dans une bataille qu’un jour il livrait à des ennemis supérieurs en nombre, il fut aveuglé par un coup de feu.

 

 

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Aussitôt il porta les mains à ses yeux et, comme la douleur qu’il ressentait était excessive, un soldat qui se trouvait près de lui s’empressa de tremper son mouchoir dans l’eau claire et l’appliqua, en le nouant par derrière, sur les paupières meurtries de son capitaine.

 

 

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Tandis que ces premiers soins lui étaient prodigués, les hommes qui composaient sa troupe avaient battu en retraite, et un officier ennemi ayant vu son terrible adversaire mis hors combat, s’approcha de lui, à l’effet de le faire prisonnier.

 

 

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Colin Maillard, les yeux bandés et réduit à l’impuissance, ne put que se résigner à son sort. Alors l’officier ennemi le fit conduire sans tarder sous la tente de son général en chef et lui dit : « - Maintenant que tu ne vois plus, nous n’avons plus rien à craindre de toi ; d’ailleurs tu es à présent en notre pouvoir. »

 

 

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Ce à quoi Colin Maillard répondit : « - Je suis votre prisonnier,, soit, mais sachez que ma cécité ne m’empêche pas de discerner un allié d’un ennemi. « - Oh ! oh ! fit l’autre, c’est beaucoup s’avancer, l’ami ; je veux tenter l’expérience. Que tu devines qui te touchera et que tu me donnes ensuite une somme convenable, et je le promets de te rendre la liberté. – Marché conclu », dit l’intrépide blessé.

 

 

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Retourné et les mains derrière le dos, Colin Maillard attendit que quelqu’un vînt vers lui. Alors un officier appartenant à l’état-major ennemi, et dont le dolman était constellé de décorations, s’approcha du captif, mais au cliquetis des crois, Colin Maillard l’identifia bien vite.

 

 

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« - C’est l’aide de camp, s’écria-t-il. – Bravo ! fit le chef, tu es prompt et précis dans ta réponse ; ainsi que cela t’a été promis, tu vas être reconduit séance tenante auprès de tes soldats. »

 

 

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Ainsi fut fait. La somme exigée fut versée, et Colin Maillard, ramené au camp, fut porté à l’ambulance où on lui prodigua les soins que nécessitait sa blessure. Mais cette aventure fit du bruit, et tout le soir on en parla dans les salons du Roy.

 

 

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Les dames de la cour, toujours en quête de nouveaux jeux de société, créèrent le jeu de colin-maillard : il s’agissait, les yeux bandés, de dire le nom de la personne que la main parvenait à saisir.

 

 

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Ce jeu fit bien vite fureur et ne tarda pas à répandre dans toutes les sociétés : les enfants s’en emparèrent et il devint bientôt universel. Quant au brave capitaine, qui en avait été le parrain…

 

 

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… son infirmité ne lui permit pas de

Carrière, mais son nom n’en est pas

Célèbre et l’aventure dont il fut le héro

Que la postérité en garde la mémoire.

 

[TEXTE MANQUANT à la fin de la cellule :’(]

 

 

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1 septembre 2012

8 septembre 1912 : pages 10 & 11 (2/3)

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Le cirque Caroni, jadis si florissant, est maintenant un établissement de cinquième ordre. Son malheureux propriétaire se rend compte que les belles recettes ne reviendront jamais plus et il se désole ainsi que sa fille Rosette et son clown Badaboum.

 

 

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Caroni est pourtant de première force dans les exercices équestres. Il va caresser son cheval Coco, animal jeune encore, mais moins fringant depuis que l’avoine lui est comptée avec parcimonie et depuis qu’il est forcé de trainer la roulotte à la place d’un vieux camarade mort. Coco semble dire à son maître : « - Trouve un numéro inédit, car tu sais bien qu’il n’y a plus que la nouveauté qui réussit auprès du public. » Du nouveau ! Caroni y songe bien, mais ça n’est pas commode à trouver !

 

 

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C’est aussi l’idée du clown Badaboum. Ce jeune homme de vingt-cinq ans, de son vrai nom Pierre Lefort, est un garçon intelligent et instruit. Il n’avait pas trouvé de position, ses études terminées, et, un jour, las de lutter pour la vie, il allait se pendre, lorsque M. Caroni avait empêché son acte de désespoir et l’avait gardé avec lui.

 

 

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Vêtu, dès lors, d’un vieux costume de clown, et sous le surnom de Badaboum, Pierre amusait le public et était un aide précieux pour M. Caroni. Reconnaissant de ce que son patron avait fait pour lui, il se rendait compte que bientôt le cirque serait saisi et il cherchait un moyen d’éviter ce désastre.

 

 

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Vivant dans l’intimité de Caroni et de sa fille, Pierre n’avait pas tardé à s’éprendre de Rosette, gentille équilibriste, à laquelle il n’était pas indifférent. Mais il n’osait parler de son projet à Caroni, de peur d’empêcher peut-être un mariage plus brillant pour sa fille.

 

 

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Afin de retarder si possible la saisie du cirque, la petite troupe se met en route, un soir, pour une ville voisine et pendant que la voiture roule, Pierre a soudain une idée en regardant une image qui représente un éléphant à la démarche lourde et pesante, Il en fait part à Rosette.

 

 

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Celle-ci, enthousiasmée par l’idée de Badaboum, lui promet sa main s’il réussit et veut bien le seconder dans l’exécution de son plan. Tous deux se mettent au travail et taillent dans de vieilles toiles du cirque hors d’usage, un magnifique complet d’éléphant.

 

 

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Le lendemain, pendant que Pierre habille le cheval Coco avec ce complet, Caroni survient et s’étonne. Pierre lui explique son plan : « - Au lieu d’un éléphant mastoc et lourd comme ils sont tous, nous montrerons au public un animal souple et agile, puisque c’est votre beau coursier qui remplira le rôle. »

 

 

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Très amusé, Caroni oublie pour un instant ses soucis et monte sur la bête. L’éléphant comique rue, saute et piaffe. La répétition est très brillante et fait présumer d’heureuses représentations. « - Le costume d’éléphant sera pour Coco ce que le costume de clown a été pour moi, c’est-à-dire un succès, » explique Pierre.

 

 

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Le brave garçon ne s’était pas trompé. La première représentation avec l’éléphant comique eut un très gros succès qui ne fit que s’accentuer par la suite. Si bien qu’on dut un beau jour refuser du monde, et on augmenta le prix des places.

 

 

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L’argent rentra dans la caisse, les dettes furent payées et le clown Badaboum songea sérieusement cette fois à demander sa récompense. Il pensait bien qu’à présent Caroni lui accorderait la main de sa fille Rosette, mais sa timidité était si forte qu’il n’osait pas parler encore.

 

 

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Un évènement vint le tirer d’embarras quelques jours plus tard. Il y avait dans la ville deux malandrins, anciens forains, qui avaient constaté le succès de l’éléphant comique et avaient projeté de le voler. Ils savaient où on remisait la bête à la fin de la représentation.

 

 

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Mais ce soir-là, Badaboum, après avoir déshabillé le cheval, avait dit à Caroni : « - L’éléphant comique a un gros succès, mais si Coco tombait malade un jour, qui doublerait son drôle ? Nous n’avons pas encore de cheval de rechange.. Si vous m’en croyez, voyons si nous-mêmes nous ne pourrions pas exécuter une scène, moins comique et moins folle certainement, mais présentable néanmoins. »

 

 

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Devant ce raisonnement juste, Caroni et son clown s’étaient placés dans la robe de l’éléphant, lorsqu’on entra dans la remise où ils se trouvaient. Croyant que c’était Rosette qui venait les faire répéter, ils se laissèrent emmener par les deux malandrins que nous connaissons.

 

 

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Ils marchèrent un bout de temps, puis les deux voleurs firent entrer le cheval – car ils savaient parfaitement que l’éléphant était un animal déguisé – dans une écurie qu’ils avaient louée. Mais au moment de déshabiller le cheval, ils s’aperçurent qu’ils ne possédaient pas d’allumettes. «  Bah ! se dirent-ils, fermons la porte à triple tour, dès demain matin nous le débarrasserons de sa robe et déguerpirons avec lui. »

 

 

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Restés seuls, Caroni et Pierre sortirent de l’éléphant et se rendirent compte de leur situation, car ils avaient entendu les dernières paroles des voleurs. Ils étaient enfermés, mais en grimpant le long d’une poutre, ils purent atteindre une lucarne et s’évader.

 

 

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« - Sans toi, Badaboum, notre cheval et son déguisement nous étaient volés. Je te dois une récompense. Que désires-tu ? » dit Caroni au clown, chemin faisant. Pierre s’enhardit alors et demanda à l’écuyer la main de sa fille, qui lui fut accordée de bon cœur. Le lendemain, de bonne heure, les deux malandrins s’aperçurent avec stupéfaction…

 

 

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… que leur écurie était vide. Ils ne s’expliquaient pas comment un cheval avait pu disparaître par une lucarne. « - Il n’y a pas à en douter, dirent-ils, c’était bien un cheval extraordinairement savant. Nous avons raté notre affaire ! » Inutile de dire qu’une heure après ils étaient arrêtés par les gendarmes, sur la dénonciation de Caroni et de son futur gendre.

 

 

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1 septembre 2012

8 septembre 1912 : pages 8 et 9 (1/3)

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Ah que coucou !

 

Une fois n’est pas coutume, aujourd’hui je poste toutes les pages restantes de cet illustré ce qui me permettra de vider un peu le disque dur de mon PC avant de scanner le numéro suivant… Donc aujourd’hui il y a 3 billets pour les 5 pages restantes…

 

Parmi celles-ci se trouvent les fameuses pages 8 et 9 (que vous voyez ci-dessus) qui m’ont posé de gros problèmes alors que la solution était toute simple… ce qui me fait poser la question suivante : « Pour quels motifs étranges l’être humain tente-t-il de compliquer une solution qui s’avère être fort simple ? Sommes-nous réellement tous masochistes ???? »

 

En tout cas voici ces 3 histoires (pour les 2 autres, sans présentation ;))

 

Bon courage pour les reconstituer (ne cherchez pas midi à 14 heures ! elles sont aussi simple à refaire qu’il le paraît….

 

Bisous,

@+

Sab

 

 

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« - Voyons, ma petite Blanchette, me dit Mlle Roumiou, il faut avoir plus de courage ! Vous n’êtes plus un Baby, maintenant, car voici que vous allez avoir dix ans ! A tout prendre, votre oncle Camille n’est sans doute pas méchant qu’il en a l’air, et puis, vous finirez bien par retrouver votre oncle Lolo, pour qui vous paraissez avoir une préférence. J’ai cru comprendre que, pour l’heure, il est absent de France, en voyage en Extrême-Orient ; mais il reviendra, et alors, il vous prendra avec lui, et vous serez tran-quille : il faut avoir un peu de patience !

« Et elle m’embrassa pour me donner un peu de courage.

« Mais j’étais toute désespérée.

« Enfin, comme j’étais habillée, mademoiselle me quitta pour aller rejoindre mon oncle, comme il le lui avait commandé, et je demeurai à peu près une demi-heure toute seule, à pleurer, et à regretter les jours passés de ma toute petite enfance qui ne reviendraient plus, pour moi.

« Quand Mlle Roumieu revint, je remarquai qu’elle était tout pâle.

« - Qu’avez-vous ? lui demandai-je.

« - Rien, ma petite !

« - Je parie que mon oncle vous a fait de la peine ?

« Alors elle me gronda :

« - Pourquoi voulez-vous que votre oncle Camille m’ait fait de la peine ? Il faut perdre cette idée préconçue que votre oncle est un méchant homme.

« - Je ne l’aimerai jamais ! fis-je.

« - Comme je vous plains, Blanchette, si vous demeurez avec ces sentiments. Il faut au contraire vous apprendre à le chérir, car vous n’avez plus que lui !

« - Et mon oncle Lolo !

« Elle eut un geste de découragement.

« Puis :

« - En attendant, il va falloir nous dire adieu, petite Blanchette ! fit Mlle Roumieu bien tristement.

« - Nous dire adieu ?... Est-ce que vous allez me quitter, vous aussi ?

« Elle fit oui de la tête.

« Et moi, de me fâcher, lui disant :

« - Vous ne m’aimez plus… personne ne m’aime… que vais-je devenir, si vous ne demeurez plus auprès de moi… avec qui pourrais-je parler de Lucky-Cottage… et de mon papa et de ma maman…

« Et de nouveau mes larmes se mirent à couler.

« - Mon pauvre petit enfant, me dit Mlle Rou-

 

[FIN 1ère colonne]

 

mieu. je n’aurais pas mieux demandé de demeurer toujours avec vous. Mais je ne suis pas la maîtresse, moi ! Votre oncle vient de m’avertir que ni lui ni vous n’étiez assez riches pour garder une institutrice ! Alors, il faut bien que je trouve une autre place pour gagner ma vie.

« - Et moi, m’écriai-je égoïstement, que va-t-il faire de moi. Va-t-il donc me garder constamment avec lui ?

« - Non ! Justement votre oncle vient de me faire part, aussi, de ses projets à votre égard. Il va vous mettre en pension, à Londres ! Demain je partirai pour la France, et votre oncle vous conduira dans quelque Children School londonien, où somme toute, vous serez très heureuse avec des petites filles de votre âge, avec qui vous pourrez jouer tout à votre fantaisie.

« Cette idée de vivre avec des petites filles de mon âge, et surtout de ne pas demeurer avec mon oncle Camille, que décidément j’avais pris en grippe pour de bon, me consola un peu, et je n’éprouvais pas à me séparer de Mlle Roumieu tout le chagrin que j’aurais dû ressentir.

« Pourtant, le lendemain matin, quand, m’ayant habillée pour la dernière fois, elle m’embrassa et que je songeai que de longtemps, longtemps, je ne la reverrais plus, je pleurai bien fort, et, j’étais déjà dans le train, en face de mon oncle, que mes larmes n’étaient pas encore taries.

« Nous arrivâmes à Londres.

« Mon oncle avait sans doute arrêté toutes ses dispositions, car, à la station, il prit un cab, donna une adresse et nous voilà partis à travers la ville.

« Après une course de plus d’une heure, et avoir traversé sur un pont une belle rivière

 

[FIN 2e colonne]

 

que je sus depuis être la Tamise, le cab pénétra dans un quartier fort vilain, très populeux et sale qui était White-Chapel.

« C’était là, dans une noire et étroite ruelle que se trouvait la pension où mon oncle avait projeté de m’enfermer.

« La porte franchie, une petite fille haillonneuse nous introduisit dans une salle obscure et mal meublée, où bientôt, vint nous rejoindre une petite vieille, sèche et maigre, avec un bonnet sale d’où s’échappaient les mèches de ses cheveux grisonnants.

« Elle salua mon oncle, qui lui dit :

« - Miss Shad, voici la petite fille dont je vous ai parlé !

« - Qu’elle est mignonne ! fit Mrs Shad, et elle m’embrassa. Je remarquai qu’elle sentait l’alcool, et que sa joue râpait comme celle de papa, quand il avait oublié, le matin, de se faire la barbe.

« - Comment s’appelle-t-elle ? demanda encore Mrs Shad.

« - Alba Hearth ! répondit gravement mon oncle.

« - Mais non, m’écriai-je. Je m’appelle Blanche Delaire !

« Mon oncle m’écrasa sous un regard terrible et prononça :

« - Vous vous appelerez comme je veux !

« Mais Mrs Shad, passant sa main sale sur me cheveux, d’une voix doucereuse :

« N’est-ce pas la même chose ! (1)

« Puis, regardant mon oncle avec un clignement d’œil dont je ne pus saisir la signification, elle ajouta :

« - Puisque vous devez vivre désormais en Angleterre, ne vaut-il pas mieux anglicaniser votre nom !

« - Oui, fit mon oncle sévèrement et à l’avenir je vous prierai de vous souvenir que vous vous nommez désormais Alba Hearth ! Sans ça…

« Et il esquissa un geste de menace.

« Je baissai la tête, et ne répondis rien.

« Là-dessus, mon oncle, s’adressant à Mrs Shad, dit encore :

« - Alors, vous avez compris, n’est-ce pas, ce que je demande de votre obligeance ?

« - Parfaitement !

« - Je puis compter sur vous ?

« - Certes !

- D’ailleurs, souvenez-vous que mon ami Tom Hurdle me tiendrait au courant, à la moindre… erreur !

« - Votre honneur peut avoir pleine confiance ! répliqua Mrs Shad avec une révérence.

« Et là-dessus, mon oncle me baisa au front, froidement, si froidement que cette caresse me glaça, puis il tourna les talons, après m’avoir dit simplement :

« - Ma chère, tâchez de vous plaire dans cette maison !

« Ah ! Elle n’était guère plaisante, la maison de Mrs Shad. Il y avait une cour qu’on appelait le jardin, et qui avait plutôt l’air d’une

 

(1) En anglais Hearth signifie : Atre.

 

[FIN page 8]

 

 

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puits, tant elle était sombre et humide ; jamais le soleil n’y parvenait, et au milieu, un pauvre tilleul haussait tant qu’il le pouvait ses pauvres petites branches, comme pour monter plus haut que la hauteur des murs et respirer un air meilleur.

« Dans cette cour où Mrs Shad m’introduisit, cinq ou six fillettes de mon âge s’amusaient tristement, et je remarquai qu’elles étaient maigres, chétives, et pâles, aussi, avec des figures moroses et renfrognées.

« Il est vrai que je tombais mal ; la nuit même, une petite pensionnaire de mon âge était morte, et à peine installée, je dus suivre le convoi de cette petite compagne que je ne connaissais point.

« Mais à vrai dire, la pension de Mrs Shad n’était point d’une gaîté folle ; Mrs Shad, pas plus que sa fille miss Dorothea, n’était une méchante femme, mais elles étaient pauvres, n’avaient pas les moyens de se payer une servante, ce qui fait que les élèves étaient obligées de travailler et de s’occuper tour à tour de tous les soins du ménage.

« Comme distraction, on nous conduisait parfois à Victoria Park, et c’était tout.

« Pourtant, je ne m’y ennuyais pas ; tout me paraissait préférable à l’idée d’aller demeurer avec mon oncle Camille, et chaque fois que je voyais arriver à la pension Master Hurdle, que je savais être l’ami de mon oncle, j’avais toujours peur qu’il ne me vînt chercher pour me conduire à lui.

« Pourtant, il n’était pas bien méchant, Master Hurdle, avec sa figure toujours mal rasée, ses grosses besicles, et son nez barbouillé de tabac. Même quelquefois, il m’apportait des bonbons. Une seule fois il se fâcha. Ce fut un jour que, le voyant d’excellente humeur, et tout badin, je lui demandai s’il n’était pas aussi l’ami de mon oncle Lolo.

« Alors, il leva les bras au ciel, fit sa grosse voix et prononça :

« - Miss Hearth, je vous défends de parler de votre oncle Lolo.

« Il y avait à peu près cinq mois que j’étais chez Mrs Shad, quand un matin, c’était il y a tout juste trois jours, miss Dorothea me dit :

« - Alba, mon enfant, vous allez venir avec moi faire une petite course, du côté de la Cité. Cela vous fera du bien !

« Tout heureuse de cette sortie, je courus mettre mon chapeau, et je suivis miss Dorothea.

« Mais au lieu de se diriger vers la Cité, elle prit la direction que je connaissais bien de Victoria Park.

« Nous y arrivâmes bientôt.

« Et là, voici qu’un gentleman, que je ne connaissais pas, et qui paraissait attendre miss Dorothea, vint vers nous, et s’adressant à Miss Dorothea :

 

[FIN 1ère colonne]

 

« - C’est là l’enfant ?

« - C’est elle ! répondit miss Dorothea.

« - All right ! fit-il.

« Puis, s’adressant à moi :

« - Voilà une petite fille, dit-il, qui va être bien contente ! Je suis sûr qu’elle me suivra avec plaisir, quand elle saura que je vais la mener à Paris !

« - A Paris ! fis-je. Non, non, je ne veux pas aller à Paris, si l’on me conduit chez mon oncle Camille !

« - Petite bête ! fit alors miss Dorothea. Ce n’est pas à votre oncle Camille que l’on va vous conduire, mais à votre oncle Lolo !

« Frappée de stupeur, je regardai miss Dorothea :

« - Est-ce possible ?

« Ce fut le gentleman qui répondit :

« - C’est exact ! Je suis un ami de votre oncle Lolo : John Muddy ! Vous ne connaissez pas John Muddy ? Il m’a prié de vous amener à lui, et j’espère que vous n’allez pas faire de difficulté pour me suivre ?

« - Si c’est pour rejoindre mon oncle Lolo, répliquai-je, je vous suivrai jusqu’au bout du monde !

« - Voilà une brave enfant, risposta Muddy. En ce cas, en route !

« - Au revoir, ma petite Blanche, fit miss Dorothea, et soyez toujours sage !

« Et, sans attendre de réponse, m’ayant embrassée, elle fila, ma laissant seule avec ce Muddy, et toute surprise de l’avoir entendue me nommer Blanche, comme autrefois.

« Mais je n’eus pas le temps de m’étonner davantage. Muddy m’avait prise par la main,

 

[FIN 2ème colonne]

 

puis, au sortir de Victoria Park, il héla une voiture et je l’entendis crier au cabman :

« - A Charing-Cross !

« Je savais que c’était le nom d’une station de chemin de fer.

« - Quoi, dis-je, nous allons partir tout de suite !

« - N’êtes-vous pas pressée de voir votre oncle !

« - Mais je n’ai pas dit au revoir à missis Shad, ni à mes petites amies…

« - Bah ! fit-il avec un geste d’insouciance.

« - Et ma malle ?

« - Miss Dorothea l’a déjà fait porter à la gare.

« D’ailleurs, nous arrivions à Charing-Cross.

« Là, comme nous pénétrions sur le quai, un grand garçon, qui fumait flegmatiquement sa pipe, s’approcha de nous, et s’adressant à Muddy :

« - C’est là l’objet ? fit-il.

« - Oui.

« - Tout a donc réussi ?

« - Tu vois !

« - Alors embarque.

« Je sus, pendant le voyage, qu’il s’appelait Paddy.

« Il était très gai, et jusqu’à Douvres, il ne fit que plaisanter et que rire.

« A Douvres, notre train s’arrêta tout juste devant le bateau qui devait nous conduire en France, et, nous allions tous les trois franchir la passerelle, quand un vieillard, passant rapidement près de nous, cria distinctement ces paroles à Muddy, sans même le regarder :

« - Les requins sont dans le port de Calais, et malheur aux thons qui s’y égarent ! Mais la passe de Saint-Valéry est libre et d’Hastings le thon va tout droit à Saint-Valéry !

« A ces mots, Muddy et Paddy se regardèrent.

« Puis, ils virèrent les talons, et, au lieu de s’embarquer dans le bateau, ils m’entraînèrent vers la gare, où, une demi-heure après, ils me firent monter dans un train en partance pour Salisbury. Mais ils s’arrêtèrent à Turnbridge, et là prirent un autre train pour Hastings, où nous n’arrivâmes qu’à la nuit.

« Il fallut donc passer la nuit à Hastings, et ce ne fut que le lendemain, après déjeuner, qu’un bateau de pêche nous conduisit à Saint-Valéry.

« Toutes ces hésitations, tous ces changements d’itinéraire n’étaient pas sans me surprendre un peu. Mais j’étais toute à la joie de revoir bientôt mon cher oncle Lolo et j’avais hâte d’arriver à Paris.

« Il fallait encore coucher à Saint-Valéry, car le train pour Paris était parti quand nous débarquâmes ; mais le lendemain, d’assez bonne heure, m’assura Muddy, nous prendrions le train du matin qui nous amènerait à Paris avant midi.

 

(A suivre.)

 

 

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31 août 2012

8 septembre 1912 : pages 6 et 7

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Ah que coucou !

 

Parce que la mise en page de cette histoire reprend exactement les mêmes spécificités que les pages précédentes, je ne vais pas les remettre ici.

 

Voici donc, suite à ma signature, les images et les textes pour que vous puissiez, vous aussi, reconstruire chez vous ces deux nouvelles pages… ;) – oui, oui, les tricheurs qui commencent à affluer ici avec leur clé USB pour copier mon fichier ;) mdrrrrr !! bossez un peu, vous aussi ;) mdrrrrr !!

 

Bisous,

@+

Sab

 

A_1

A01

Au commencement de l’année dernière, une riche Américaine vint commander à une grande modiste de la rue de la Paix des chapeaux garnis d’oiseaux de paradis, pour elle et ses deux filles, qui étaient invitées à assister au couronnement du roi d’Angleterre. La commande était magnifique. Sa cliente partie, Mme Purchic, la modiste, constata qu’elle n’avait qu’une seule plume en magasin

 

A02

Très perplexe, elle ne savait comment elle allait se tirer de cette affaire, lorsque sa première employée, Mlle Lisette Blanchon, s’offrit d’aller en chercher elle-même, au Congo ou ailleurs, s’il le fallait. En trois mois elle était certaine de faire le voyage et de rapporter le stock nécessaire. Lisette était une Parisienne de vingt-trois ans, débrouillarde et d’une bonne santé. Mme Purchic accepta, lui donna de…

 

A03

… l’argent et lui souhaita bonne réussite. Lisette fit rapidement sa valise et prit le train pour Bordeaux où elle s’embarqua pour le Congo. Arrivée à Boma, à l’embouchure du fleuve Congo, elle prit passage sur un petit steamer qui remontait très avant dans l’intérieur du pays. Après dix jours de navigation, elle arriva à Bonga, au confluent de la Sangha. C’était un centre important. Elle le trouva ravagé par une razzia…

 

A04

… opérée il y avait quelques jours par les fameux Makololos, tribu anthropophage, qui avaient tout pillé et emporté une provision de plumes d’oiseaux de paradis recueillies par les habitants du pays. Ces derniers avaient été tués ou emmenés prisonniers, pour être dévorés par les cannibales. L’administrateur s’était enfui à grand’peine et rassemblait des troupes pour châtier les Makololos.

 

A05

Lisette résolut de se rendre chez ces sauvages et de leur acheter directement, à prix d’or, le stock de plumes volées. Comme le steamer continuait son chemin sur le Congo et que les Makololos habitaient les bords de la Sangha, Lisette acheta au capitaine du bateau un canot à pétrole, des vivres et des munitions. Elles avait remarqué à Bonga deux négrillons du même âge, de la même taille et très intelligents.

 

A06

Connaissant la langue et les mœurs du pays, ils devaient lui être utiles. Elle les engagea, mais comme ils étaient difficiles à reconnaître un de l’autre, elle peignit sur l’un des barres horizontales jaunes, et l’appela Caramel ; sur l’autre, des croisillons verts et rouges, et le nomma Berlingot. Puis, très émue, elle fit ses adieux à ses compagnons de route, qui la saluèrent de leurs hourrahs.

 

A07

Caramel tenait la barre du gouvernail, Berlingot surveillait le moteur. Lisette avait revêtu un costume de flanelle blanche et arboré un masque de velours noir pour garantir son visage des atteintes du soleil. Le lendemain de leur départ ils arrivèrent aux approches d’un grand village nègre d’où partaient des cris, des chants ; c’était la capitale des Makololos. Au milieu des cases, sur une place…

 

A08

… une centaine de noirs dansaient, s’agitaient autour d’un grand feu ; ils étaient à la fin d’un banquet où ils avaient mangé des prisonniers. Leur chef, un sorcier recouvert d’un manteau de plumes, de verroteries, semblait présider la fête. Lorsque le canot accosta, il se leva et s’approcha des voyageurs. A la vue de Lisette, le sorcier hésita, puis s’inclina jusqu’à terre avec des marques de profonde vénération…

 

A09

… en l’appelant « Macouba, ololo ». Les noirs accoururent à leur tour et se couchèrent à terre comme pour l’adorer. Caramel dit à Lisette que tous la prenaient pour une divinité redoutable qu’ils priaient de rester parmi eux, dans le grand Temple. Le masque noir les trompait sur son origine. Malgré le danger de la situation, Lisette voulut profiter de la méprise. Elle laissa Berlingot à la garde du canot et se rendit à leur désir.

 

A10

Elle fut conduite en grande pompe, sur un palanquin de bambou doré, jusqu’au Temple. C’était un vaste cube de terre battue et séchée, percé d’étroites fenêtre et entouré d’une épaisse palissade. Au milieu de la cour s’élevait une sorte d’autel surmonté d’un parasol rouge. Lisette vint s’y asseoir, tandis que, cérémonieusement, le sorcier lui mettait sur la tête une…

 

A11

Attention pour le texte : la partie en fin de cellule est manquante… :(

… coiffure de plumes d’oiseaux du paradis. Des
mations saluèrent l’intronisation de la nouvelle
des Makolols. Chacun de ces derniers vint d
à ses pieds son offrande : plumes merveilleuse des oiseaux de paradis, fruits des tropiques, jatte
etc… Comme l’heure de la sieste approcha le sorcier ferma les portes de l’enceinte et tous se r

[image et texte manquant]

 

B

B01

Le négrillon fit le trajet sans difficulté ; les noirs, pendant la grande chaleur, dormaient comme des loirs dans leurs cases. Caramel apporta quatre carabines à répétition et plusieurs centaines de cartouches. Une fois ces munitions rangées à côté d’elle, la porte solidement verrouillée, Lisette se sentit un peu plus rassurée ; elle déjeuna avec son compagnon et dormit quelques heures.

 

B02

Vers le soir, le sorcier demanda à voir Lisette. Il venait la prévenir qu’une grande fête se préparait en son honneur pour le lendemain, qu’un festin y serait donné et que les captifs de Bonga seraient immolés et rôtis sur un signe de la déesse Macouba. Par l’intermédiaire de Caramel la jeune fille fit comprendre au sorcier qu’elle se refusait absolument…

 

B03

… à tout sacrifice humain et qu’elle ordonnait de mettre en liberté les prisonniers en question. Le sorcier, très étonné, l’examinait fixement, le masque noir l’intriguait fortement, il soupçonnait là un subterfuge. Brusquement il s’élança et arracha le frêle objet. A la vue du pâle visage de Lisette, il recula et jeta un cri de triomphe et de haine : « - Malheur à toi…

 

B04

… s’écria-t-il, pour nous avoir trompés et profané le temple de la Divinité ! » Et il se retira en la menaçant encore. Derrière lui, Lisette et Caramel barricadèrent la porte de l’enceinte. Décidemment les affaires tournaient mal, il fallait agir rapidement, Caramel reçut l’ordre d’aller au canot prévenir Berlingot de filer à toute vitesse chercher du secours à la…

 

B05

… première station. Cette commission faite, Caramel devait tâcher de savoir ce qui se passait dans le village nègre. Leste comme un singe, Caramel se glissa au dehors et se faufila à plat ventre dans les buissons ; ses rayures jaunes et noires le faisaient prendre pour un boa et à se vue les indigènes s’écartaient de lui avec terreur. Arrivé à la berge du fleuve, il trouva Berlingot…

 

B06

… en lutte avec des Makololos qui buvaient son pétrole à pleins bidons ; le canot était éventré. Berlingot sauta dans une pirogue et, à l’aide de pagaies, fila rapidement, emporté par le courant descendant. Resté seul, Caramel reprit son chemin à plat ventre et arriva au centre du village. Le sorcier haranguait la foule, lui révélait la présence d’une étrangère dans le Temple et proposait d’y mettre le feu sans délai…

 

B07

… pour purifier le Temple et anéantir ses hôtes sacrilèges. Il fit entasser des fagots tout autour de la palissade et y mit le feu. Une grande lueur rouge illumina la forêt, un cercle de flammes entouraient le temple. Lisette et Caramel (ce dernier était rentré aussitôt) s’armèrent chacun d’une carabine et attendirent les événements. La palissade brûlée, les noirs, brandissant leurs sagaies, s’avancèrent à l’assaut du Temple.

 

B08

Des coups de feu réguliers les abattaient à chaque pas ; il y en avait déjà une trentaine tués ; les autres, se protégeant des balles par des bourrées de joncs, arrivèrent au mur du Temple et allumèrent ces fagots. Une fumée épaisse pénétra dans l’intérieur, suffoquant Lisette et Caramel, qui se crurent perdus. Tout à coup une fusillade éclata dans le village, les noirs s’enfuirent en hurlant.

 

B09

Une voix bien connue appela Caramel et Lisette. C’était Berlingot, suivi de l’administrateur colonial et de miliciens qu’il avait rencontrés sur la Sangha. Il lui avait raconté l’étrange situation de Lisette et désigné le campement des Makolols. L’administrateur, qui avait à venger l’agression de Bonga, fit forcer la vitesse de sa canonnière et arriva à temps pour sauver les deux prisonniers.

 

B10

Le village fut rasé et le sorcier pendu à un palmier. Les exécutions terminées, tout le monde remonta dans la canonnière et rentra à Bonga. Lisette, qui n’avait pas oublié le but de son voyage, emportait un stock magnifique de plumes. Après deux jours de repos à Bonga, où elle fut fêtée par la colonie européenne, elle reprit un streamer qui descendait à Bona et Libreville. Quinze jours après, elle s’embarquait pour Bordeaux, où elle arrivait trois semaines plus tard…

 

B11

… avec son précieux ballot et ses deux négrillons. A la gare d’Orléans, toute la maison Purchic l’attendait, Mme Purchic en tête, qui l’embrassa avec effusion. Il restait encore dix jours pour confectionner les fameux chapeaux : ils furent livrés en temps voulu et fort admirés à la cour d’Angleterre. Les frais de voyage de Lisette payés, il resta encore un beau bénéfice à Mme Purchic. Quelques mois plus tard, Lisette Blanchon épousait le fils de Mme Purchic…

 

B12

… très heureuse d’avoir pour bru et successeur une jeune fille aussi intelligente qu’énergique et qui apportait comme dot une provision inestimable de plumes d’oiseaux de paradis. Caramel et Berlingot revêtirent l’uniforme rouge et or des grooms et firent l’admiration des passants. Lisette n’oublia pas son masque noir qui l’avait fait prendre pour la déesse Macouba. Elle l’adopta comme enseigne de son magasin, surmonté d’une belle couronne de plumes d’oiseaux de paradis.

30 août 2012

Mythes et Légendes de la Grèce antique : Orphée

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Ah que coucou !

 

Aujourd’hui, pour nous reposer un peu, je vous propose le mythe grec Orphée, traduit du Grec par Eduard Petiška.

 

Orphée

 

Dans une région de Grèce appelée la Thrace vivait, il y a très longtemps, un fameux aède : Orphée. Il accompagnait avec une lyre et chantait si merveilleusement que personne ne pouvait résister à sa musique. Les oiseaux eux-mêmes l’écoutaient en silence et les animaux quittaient la forêt pour le suivre. Le loup trottait à côté de l’agneau, le renard suivait le lièvre, sans qu’aucun animal cherchât querelle à un autre. Même les serpents quittaient leurs trous et les pierres s’écartaient pour faire un chemin devant Orphée. Ses chansons arrêtaient le cours des rivières et les poissons sortaient de l’eau pour l’écouter…

Les hommes riaient ou pleuraient, selon que le chant était gai ou triste. Ils oubliaient tous leurs soucis. Les dieux, attirés eux aussi par la voix d’Orphée, se rendaient en suivant la Voie Lactée aux endroits où il chantait.

De même les naïades quittèrent les vagues dès qu’elles entendirent les sons mélodieux. Orphée tomba amoureux de l’une d’elles, l’emmena avec lui et l’épousa. La nymphe Eurydice était aussi jolie que ses chansons et pendant quelques temps ils vécurent très heureux. Un jour, Orphée dut s’absenter et Eurydice resta seule. Dans sa solitude lui vint la nostalgie des prairies vertes et douces où murmuraient les rivières et les sources. Là-bas, dans les eaux scintillantes, vivaient ses sœurs les naïades. Eurydice pensait souvent à elles ; aussi décida-t-elle de leur rendre visite. Elle partit en courant chez elle, tant elle était pressée de les surprendre. Elle se hâtait par les raccourcis quand, soudain, elle ressentit une douleur aiguë au pied, qui inonda bientôt tout son corps. A terre, elle aperçut un serpent venimeux qui rampait dans l’herbe. Elle tomba évanouie dans l’herbe. La morsure était mortelle, son cœur cessa de battre. Eurydice était morte, et ni les pleurs de ses sœurs, ni le désespoir d’Orphée, qui était accouru, ne purent la ramener à la vie.

Orphée enterra Eurydice, et, avec elle, toutes les chansons gaies. Tristement il erra par le monde, et ceux qui écoutaient ses nouvelles paroles avaient le visage ruisselant de larmes. , Les feuilles des arbres soupiraient et les bêtes sauvages, les yeux humides, sortaient des profondeurs des forêts

Orphée ne trouva la paix nulle part sur terre : il ne cessait de penser à Eurydice et à la joie qu’il avait perdue. Le temps n’adoucissait pas sa peine. Aussi, après sa longue marche, il décida de descendre sous terre, dans le monde inférieur où s’étendait l’ombre de la mort. Le dieu Hadès et sa femme Perséphone gouvernaient ce royaume des âmes des défunts. Orphée voulait convaincre les dieux des Enfers de lui rendre son Eurydice, de lui permettre d’enfreindre la loi de la mort en la laissant revivre sur terre.

Il marcha vers l’Ouest, car c’était là que se trouvait, cachée sous de noirs rochers, l’entrée du royaume. Il s’avançait inlassablement, mais, ne trouvant rien, crut avoir perdu son chemin et se mit à chanter tristement son amour pour Eurydice.

Les arbres eux-mêmes furent émus : ils lui montrèrent le chemin avec leurs branches et l’herbe, saisie de pitié, courba ses brins dans la direction du monde des ténèbres.

 

Enfin, Orphée vit une rangée de cyprès immobiles et un amoncellement de noirs rochers disparaissant presque dans un épais brouillard gris. Il pénétra dans ce nuage de mort. Soudain, trois paires d’yeux flamboyants scintillèrent devant lui et un aboiement sauvage retentit. C’était Cerbère, le chien à trois têtes, l’effrayant gardien des portes du royaume, capable de reconnaître l’odeur des vivants. Orphée se mit à chanter et les trois gueules ensanglantées se turent. Le gigantesque chien se coucha et laissa passer Orphée. Tout en chantant, celui-ci descendit un sentier escarpé, évitant les endroits d’où jaillissaient des flammes, bien qu’en l’entendant les flammes elles-mêmes se soient raidies et aient perdu de leur éclat.

L’intrépide voyageur se joignit à la foule silencieuse des ombres qui se pressaient sur les rives du Styx. Bientôt apparut la barque menée par le vieux Charon pour faire traverser le fleuve aux silhouettes grises. Orphée sauta à leur suite dans le bateau, mais Charon l’aperçut et refusa de l’emmener sur l’autre rive. Le malheureux Orphée se mit à chanter et fit pleurer le vieux rocher qui ne put se résoudre à l’abandonner. La barque fit la traversée et les âmes des morts allèrent se faire juger. Orphée, lui, partit à la recherche du roi du monde des profondeurs.

Il traversa une prairie hantée par les ombres de ceux qui, durant leur vie, n’avaient été ni bons ni mauvais ; il vit la région bénie des champs Elysées où se réjouissaient les âmes des hommes de bien, et il finit par arriver dans le lugubre Tartare. Les morts s’y repentaient de leurs mauvaises actions dans la souffrance et la torture. Sur le passage d’Orphée, la douleur disparaissait au son de sa voix. Les âmes tourmentées oubliaient leur peine en écoutant son chant. L’ombre du roi Tantale ne pensait plus à l’éternelle faim et à l’éternelle soif auxquelles les dieux l’avaient condamné. Celle de Sisyphe se reposait un moment de son vain travail, qui était de pousser un rocher au sommet d’une colline pour la voir ensuite dévaler la pente… et recommencer éternellement.

Au milieu de ce royaume, assis sur un trône noir, on pouvait voir le roi du monde souterrain, l’impitoyable Hadès. Ses cheveux noirs tombaient sur son front et ses yeux froids brillaient dans sa figure blanche. Perséphone était à ses côtés, sa face blanche émergeant d’un vêtement noir, telle la lune pâle qui apparaît derrière un nuage. Cette vision fit trembler Orphée, mais son amour fut plus fort que sa peur et il se mit à chanter devant les souverains.

Il raconta son amour pour Eurydice et la mort qui l’avait fauchée en pleine jeunesse ; il dit sa peine et son immense chagrin, puis supplia les dieux de lui rendre sa femme. De toutes manières, nul n’échappe au dernier voyage, et ils reviendraient un jour, ensemble, au royaume des morts.

Emus, Hadès et Perséphone écoutèrent son chant.

« J’exaucerai ton vœux », dit le roi, quand Orphée eut fini de chanter. « Eurydice peut retourner parmi les vivants. Mais ne te retourne pas pour voir ta femme tant que tu n’auras pas quitté le royaume des ombres. Si tu la regardes avant d’atteindre la surface, elle retournera dans les ténèbres et disparaîtra pour toujours. »

Orphée remercia chaleureusement, et, sur l’ordre du dieu Hadès, l’ombre d’Eurydice s’approcha doucement pour suivre son mari.

Ils empruntèrent le sentier qui accédait à la terre et remontèrent dans la barque de Charon pour traverser le Styx.

Tous deux, ils s’avancèrent à travers une zone où régnait un silence impressionnant. Orphée marchait devant, essayant d’entendre les pas d’Eurydice. Comme il ne pouvait percevoir aucun bruit, il fut saisi d’une crainte terrible. Il pensa qu’Eurydice avait pu tomber, qu’elle avait pu perdre son chemin ou avoir été frappée par un diabolique coup du sort.

Tout à sa peur, Orphée oublia sa promesse et se retourna. L’image d’Eurydice se brouilla devant ses yeux et sa femme bien-aimée mourut une seconde fois. Comme un dernier baiser, une brise légère toucha le front d’Orphée, le laissant pétrifié d’horreur, tout seul sur le sentier, entouré de silence. Le désespoir submergea Orphée, il courut comme un fou au bas du sentier en appelant Eurydice. Mais ce fut en vain, cette fois, qu’il supplia le rocher de lui faire traverser le fleuve.

Pendant sept jours, Orphée erra le long du Styx, espérant pénétrer encore dans le royaume des morts. Sept jours, il vécut de ses seules larmes ; en vain. Tristement il revint sur terre et se réfugia dans une région montagneuse désolée. Il chanta son malheur aux rochers et au vent. Les arbres des vallées l’entendirent et se mirent en mouvement au son de sa voix. Avant qu’il ait fini, un épais buisson l’entourait. La nudité de la montagne s’était recouverte du vert des fourrés, et des oiseaux sauvages, suivis d’autres animaux, élisaient domiciles dans la nouvelle forêt. Sa chanson atteignait même, grâce au vent, les habitations des hommes, qui, l’entendant, l’écoutaient avec sympathie.

Pendant ce temps, un groupe de Ménades, prêtresse de Dionysos, dieu du vin et de la vigne, se promenaient à travers la campagne. Ivres et à moitié folles, ces femmes surgirent dans le bosquet où Orphée exhalait sa plainte. Ses lamentations mirent en colère les exubérantes prêtresses, et l’une d’elles lui jeta son thyrse, bâton entouré de feuilles de vigne, tandis qu’une autre le visait avec une pierre.

Mais ni le thyrse ni la pierre n’atteignirent l’aède. Saisies de frénésie, les Ménades se mirent l’une après l’autre à ramasser et à lui jeter des pierres, et sous leurs cris la chanson d’Orphée faiblit. C’est seulement alors que les pierres atteignirent leur cible, prenant la couleur de son sang. Il cessa de chanter et il cessa de vivre. Quant aux Ménades, tout à leur œuvre démoniaque, elles massacrèrent aussi les animaux, encore sous le charme, qui entouraient Orphée.

L’annonce de la mort d’Orphée se répandit partout. Non seulement les hommes mais toute la nature furent en deuil. Les arbres perdirent leurs feuilles en témoignage de leur peine, les rochers pleurèrent et le niveau des eaux monta à cause de toutes les larmes versées. Les nymphes des forêts et des eaux dénouèrent leurs cheveux et mirent des vêtements noirs.

L’âme d’Orphée descendit dans le royaume des ténèbres. Cette fois, Charon ne lui refusa pas le passage. L’ombre d’Orphée rejoignait celle des autres morts. Orphée reconnut de loin son Eurydice et se hâta à sa rencontre. Il pourrait maintenant la regarder et même se retourner pour l’admirer : elle ne disparaîtrait plus.

Le dieu Dionysos ne laissa pas ce crime impuni. Il changea les jambes des Ménades en racines, leurs corps en troncs d’arbres et leurs branches furent à jamais secouées par le vent.

Les Muses, déesse de l’art et de la sagesse, enterrèrent le corps d’Orphée. Sa tête, arrachée par les Ménades, flotta avec sa lyre au fil des eaux du fleuve Hebros jusqu’à la mer, où elle atteignit l’île de Lesbos.

Depuis ce jour, les rossignols y chantent le plus merveilleusement du monde et l’île a vu naître des aèdes renommés ainsi que la fameuse poétesse Sapho. Comme elle descendait le cours de la rivière, la lyre d’Orphée continuait à jouer doucement et sa tête murmurait une chanson dont, pour la dernière fois, les eaux et les rives se faisaient l’écho.

C’est ainsi qu’aujourd’hui encore les rivières gardent le souvenir d’Orphée et chantent sa chanson.

 

Que nous apprend ce mythe ?

Une première chose, nous y trouvons la description de l’Après-Mort (les âmes des défunts empruntent la barque pour traverser le Styx afin d’être jugé devant le tribunal – ça ne vous rappelle pas quelque chose ;) ? – après le jugement les âmes vont soit au Paradis représenté par les Champs Elysées, soit dans une zone neutre représentée par une prairie, soit aux enfers où les âmes sont tourmentées.) où les défunts sont regroupés dans un royaume interdit aux vivants et dont les portes sont non seulement dissimulés aux Hommes mais aussi gardées par un énorme chien à 3 têtes.

Seconde chose, nous apprenons aussi quelles étaient la réputation des prêtresses du dieu du vin, assez mauvaise ma foi (« ivres et un peu folles »)

Et pour finir ce mythe nous enseigne que retrouver un mort, le plus simple, est d’être soi-même décédé… Attention, on ne vante pas dans ce mythe le suicide, mais plutôt on cherche ici à consoler ceux qui ont perdu un être cher en l’informant qu’une fois mort, il reverra ceux qu’il aime…

 

Bisous,

@+

Sab

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29 août 2012

Thomas Mann : Tristan

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Ah que coucou !

 

Aujourd’hui je vous propose de changer un peu de langue et de pratiquer votre allemand en lisant cette splendide nouvelle écrite par Thomas Mann en 1903 :

 

Tristan

accessible au téléchargement et/ou lecture en cliquant ici

Format : pdf

(logiciel fourni gratuitement par Adobe)

Langue : Allemand

 

Vous connaissez tous cette histoire médiévale de Tristan & Iseult… eh bien cette histoire a inspiré Thomas Mann pour écrire ce livre (d’où le titre : Tristan). Ne vous attendez pas à du plagiat, ni à une adaptation plus moderne, mais à une réflexion sur les sentiments humains. Nous y voyons l’amour (Spinell & Gabriele, sans toutefois qu’on sache si Gabriele aimait Spinell aussi) et la haine (Spinell & Klöterjahn, époux de Gabriele).

 

Cette histoire se situe dans le sanatorium ‘Einfried’ dirigé par le docteur Leander où sont soignées différentes personnes (on y trouve un général, un écrivain, …) souffrant de maladies différentes (souvent d’origine nerveuse). Dans cet établissement arrive un jour une jeune femme très belle amenée par Mr Klöterjahn que Spinell remarque tout de suite. En liant connaissance avec elle, il apprend qu’elle se nomme Gabriele Eckhof, qu’elle est l’épouse de Klöterjahn avec lequel elle a eu un fils : Anton…

Gabriele est si malade qu’on rappelle son mari à son chevet et… je vous laisse découvrir la suite de cette nouvelle ;)

 

Au cas où vous ignoreriez qui est ce célèbre écrivain du 20e siècle, je vous propose de lire la présentation qu’il a faite en 1929 quand il a reçu le prix Nobel de la littérature (en cliquant ici), à condition que vous ayez révisé votre anglais avant… eh oui… Pour recevoir ce célèbre prix, il faut se présenter… en anglais ;) !!

 

Bonne lecture !

 

Bisous,

@+

Sab

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