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30 mai 2012

Troyes libéré : Mémoire d’un enfant (12 ans)

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Ah que coucou !

 

Comme vous le constatez sur ces photo, la vision idyllique narrée par mon père est très éloignée de la vie dans certains quartiers troyens qui subissaient les vagues successives des bombardements de la gare par les alliés. De nombreux logements furent détruits (surtout ceux près de la gare), ainsi que des usines… et, à en croire certains troyens qui vécurent ces années-là, les alliés ont fait plus de dégâts dans Troyes que les Allemands…

 

Ma grand-mère m’a raconté qu’habitant en face de la plus grande concentration de matériel militaire allemand de tout le département, elle tremblait à chaque fois qu’elle entendait le moindre avion survolé la ville et paniquait quand elle entendait les sirènes d’alarme annonçant une attaque aérienne… mon père, enfant, ne semblait pas conscient de ce danger, peut-être aussi parce qu’il était trop jeune pour avoir le droit de s’éloigner du quartier sans ses parents qui ne l’ont jamais emmené là où il y avait eu des bombardements…

 

Pourtant cette interdiction il l’a enfreint une fois : le jour de la libération de la ville. Son père absent, sa mère absente (il a su plus tard qu’elle était bloquée dans les toilettes du jardin et n’avait pas réussi à en sortir avant la fin de la journée), mon père en profita pour aller voir pourquoi il entendait tirer alors que l’armée allemande avait déjà quitté la ville…

 

Il se dirigea au bruit des mitraillettes qu’il entendait au loin.

 

Quand il arriva, il vit une foule surexcitée entourant un petit groupe où, en son milieu, il y avait une femme à qui on coupait les cheveux sous les crachats de ceux qui étaient au premier rang. Un peu plus loin, un groupe de femmes portait des pancartes comme quoi elles avaient "couché avec des boches"… Mon père demanda alors à l’adulte le plus proche de lui, pourquoi on leur faisait subir ça, cet adulte lui répondit que c’était normal… A cette réponse mon père, dégouté, s’éloigna du groupe et vit alors un char américain avec des soldats qui regardaient les exactions de la foule sans rien faire pour les arrêter… Fort de ses notions d’anglais distribuées par les pilotes qui avaient transité par chez lui, mon père alla vers eux et leur demanda pourquoi ils ne faisaient rien pour arrêter cette furie. La réponse qui lui fut faite a été d’aller jouer ailleurs, que ce n’était pas un lieu pour les enfants, et ils lui donnèrent du chocolat pour lui faire quitter les lieux.

 

Mon père s’éloigna, mais, au lieu de retourner dans son quartier, il prit une autre direction où il tomba sur des FFI dont un s’approcha de lui pour lui donner l’ordre de partir à cause d’un petit groupe de miliciens qui tirait sur tout le monde et qu’ils n’avaient pas encore réussi à débusquer. Alors mon père reprit la direction de son quartier où tout était calme et joua avec ses copains…

 

La vie reprit son cours normal. Et son père rentra enfin à la maison…

 

Alors mon père lui narra tout ce qu’il avait vu de la « Libération ». La première réaction de mon grand-père a été d’enguirlander cette tête en l’air qu’il avait pour fils pour avoir mis sa vie en danger et n’avoir pas respecté les consignes parentales concernant les endroits où il pouvait s’aventurer seul. Ensuite mon grand-père lui expliqua… il lui expliqua qu’il avait eu raison de ne pas accepter ces « lynchages » car parmi celles qui étaient tondues, il y en avait beaucoup qui avaient œuvré pour la France en fournissant des renseignements précieux à la résistance, tandis que d’autres n’avaient jamais fait ce qui leur était reproché... Il lui expliqua qu’il s’agissait là plus de vengeance que de justice car nombreux ont été des français qui sont devenus résistants à la dernière minute et qui maintenant criaient haut et fort qu’ils étaient résistants alors que quelques jours avant ils contactaient la Kommandantur pour dénoncer un tel ou un tel qui avait fait ci ou ça. Il lui expliqua qu’il fallait avoir plus de respect pour ceux qui n’avaient pas retourné leurs vestes à la dernière seconde en pensant sauver leur peau et que, même si les Allemands avaient quitté la ville, il ne fallait pas leur en vouloir d’avoir fait le mauvais choix contrairement à ceux qui se prétendaient maintenant résistants et qui voulaient tuer un boche ou lyncher quelqu’un pour prouver la véracité de leur mensonge…

 

Une fois le département libéré, mon grand-père arrêta là sa contribution à la résistance et resta à Troyes avec la famille.

 

Voilà, j’ai terminé de retranscrire le résumé de tous les souvenirs de mon père concernant cette période… en agrémentant le récit par des témoignages de ma grand-mère et d’un des copains d’enfance à mon père qui, lors d’une fête, nous a narré certains passages que mon père avait passé sous silence ;) mdrrr !!! et que je n’ai pas mis en ligne dans la totalité…

 

Bon appétit !

 

Bisous,

@+

Sab

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