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5 août 2012

Légendes indiennes de la Cordillère - 6

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Ah que coucou !

 

Voici la dernière légende de Goupil dans la Cordillère des Andes. Nous avons vu hier, dans la dernière aventure narrée par Jean-Christian Spahni (pour y accéder, cliquez ici), que Goupil, cette fois-ci, s’était sorti de son aventure et nous avons appris aussi que Goupil, non content d’avoir tous les défauts déjà narrés dans toutes les autres légendes, le voilà affublés des qualificatifs de traitre, violent, et d’assassin. Voyons aujourd’hui quelle autre image renard véhicule…

 

Une pauvre famille de la cordillère des Andes avait une fille unique, âgée de dix-huit ans. Celle-ci passait son temps à garder les moutons de ses parents. Elle avait toujours fait preuve d’un zèle exemplaire mais, depuis quelques semaines, elle ressentait un étrange malaise et conduisait ses bêtes sans le moindre plaisir.

Chaque matin, avant de partir, sa mère lui remettait de la laine que l’enfant devait filer au cours de la journée. La jeune fille se mettait au travail puis, bientôt, prise de dégoût, abandonnait son ouvrage, s’étendait sur l’herbe et commençait à dormir. De retour à la maison, elle se faisait sérieusement gronder par sa mère.

- Je n’y comprends rien ! Jamais tu ne t’es conduite de la sorte ! Que se passe-t-il ? Essaie donc de travailler un peu. Tu sais que nous sommes pauvres et que la vente de la laine m’est d’un grand secours !

La jeune fille promettait de faire de son mieux mais, rapidement, cédait au sommeil.

Un après-midi, elle fut réveillée brusquement. Quelqu’un s’approchait d’elle. C’était un magnifique garçon qui la salua poliment.

- Qui es-tu, demanda-t-elle surprise.

- Je suis un ami, répondit le jeune homme.

- D’où viens-tu ?

- De la cordillère des Andes !

Il s’assit à côté d’elle et la conversation se poursuivit sur un ton de franche camaraderie comme s’ils se connaissaient depuis toujours.

- Et ma laine, s’écria la jeune fille en se rappelant la besogne qui l’attendait.

- Ne te fais aucun souci, lui conseilla le garçon. Je vais t’envoyer de l’aide.

- De l’aide ?

- Oui, tu verras.

Un petit mouton s’approcha des jeunes gens.

- Donne-moi ta laine, déclara l’animal. Je la filerai volontiers.

- Toi petit mouton ?

- Oui, moi, répondit l’animal calmement.

La jeune fille ne pouvait en croire ses yeux car, en effet, le mouton se mit à filer la laine avec une rapidité déconcertante. Le soir, elle reçut les félicitations de sa mère.

- Enfin je te retrouve mon enfant chérie ! Merci ! Et quel beau travail ! Je te félicite !

La jeune fille se garda bien d’expliquer à sa mère ce qui s’était passé. Et, pendant des semaines, elle eut la visite de son merveilleux compagnon alors que le petit mouton filait la laine avec un plaisir véritable.

- Je voudrais t’épouser, lui déclara un jour le jeune homme en la serrant très fort contre sa poitrine. Es-tu d’accord ?

- Oh, oui, car je t’aime follement !

- Alors, partons ! Ne perdons pas une minute de plus !

- Et mes parents ?

- Nous les aviserons à temps, sois sans crainte !

La jeune fille n’osa pas répliquer. Son amour était le plus fort. Mais quel ne fut pas son étonnement de se voir soudain en présence d’un immense condor. Son ami avait retrouvé sa véritable personnalité.

- Monte sur mon dos, ordonna-t-il, car nous devons être chez moi avant la nuit !

Et avec sa précieuse charge, blottie peureusement entre ses ailes, il prit son vol et se dirigea vers la cordillère. Il s’arrêta à l’entrée d’une grotte, creusée au milieu d’une falaise.

- Nous voici à la maison !

La jeune fille éprouvait une certaine tristesse en pensant à sa mère qui l’attendait. Mais, en même temps, elle se sentait pleine d’orgueil d’avoir été choisie par le condor pour être son épouse.

Des jours, des semaines passèrent. La bergère avait perdu la notion du temps. Après les joies de la vie conjugale, elle commençait à s’ennuyer sérieusement car il ne lui était pas possible de sortir de la caverne. Ce qui lui coûtait le plus, c’était cette nourriture monotone, à base de viande plus ou moins fraiche, que son illustre mari lui rapportait tous les soirs. Elle aurait volontiers mangé des fruits et des légumes, mais le condor ne voulait pas en entendre parler.

D’autres semaines passèrent. Son ennui augmentait. « Et ma mère, que sera-t-elle devenue ? » se demandait-elle souvent.

Un matin qu’elle se penchait hors de la grotte, elle aperçut au bas de la falaise un renard qui venait boire à la rivière. Elle se mit alors à gesticuler et à crier jusqu’à ce que l’animal lève enfin la tête.

- Que fais-tu dans cette caverne ?

- Je te raconterai tout. Mais avant, va chez mes parents et dis-leur de venir me chercher, supplia-t-elle.

- Oui, mais comment me croiront-ils ? Tu sais qu’on ne m’aime pas beaucoup dans la région !

La jeune fille eut une idée lumineuse.

- Tiens, rapporte-leur ce mouchoir !

Elle se pencha et laissa tomber un petit morceau d’étoffe qu’elle tenait dans son corsage.

- Et dépêche-toi, recommanda-t-elle encore.

Le renard courut jusqu’à la ferme de ses parents. Il fut très mal reçu par les chiens qui gardaient l’entrée de la demeure. Le père en entendant les aboiements furieux de ses bêtes, sortit.

- Renard, que fais-tu devant ma porte ? Va-t-en, sinon mes chiens vont te dévorer !

- Non de grâce, je viens de la part de ta fille qui est prisonnière là-bas, dans une grotte. Tenez, voici un mouchoir qu’elle m’a jeté !

La mère reconnut sans peine l’objet que tendait le renard.

- Ne perdons pas une minute, décida le père.

Il pria quelques voisins de l’accompagner et la caravane remonta la vallée, précédée du renard qui ouvrait la marche.

Ils eurent beaucoup de peine à atteindre la caverne et ne réussirent que lorsque le père se laissa glisser le long d’une corde depuis le plateau qui s’étendait au-dessus de l’abri.

On imagine la joie de la mère à revoir son enfant saine et sauve.

- Il serait préférable que ta fille s’abstienne de sortir pendant quelques jours, conseilla le médico du village, car le condor va chercher à se venger. Nous le connaissons bien, cet animal-là !

L’homme ne se trompait guère et, le soir même, l’oiseau se mit à décrire de grands cercles au-dessus du hameau en criant d’une voie désespérée :

- Rendez-moi mon épouse, rendez-moi mon épouse !

Mais personne ne lui répondit et il disparut dans la nuit.

Le lendemain, en se levant, la jeune fille vit que ses jambes étaient en partie couvertes de plumes. Elle n’osa en parler à ses parents qui étaient encore tout au bonheur de l’avoir retrouvée. Il n’empêche que la mère fut frappée par la pâleur de sa fille et par son manque d’appétit.

Un jour plus tard, les plumes recouvraient les deux jambes et la fillette maigrissait à vue d’œil.

- Mange, mais mange donc, ordonnait en vain sa mère !

Le troisième jour, ce furent les bras, le quatrième la poitrine et le dos, le cinquième le cou et le visage sur lesquels poussaient ces plumes de plus en plus nombreuses.

Se sentant d’une faiblesse extrême, la jeune fille garda le lit, n’ayant plus la force de se mouvoir.

A l’aube du sixième jour, en ouvrant la porte de sa chambre, les parents, affolés, trouvèrent le cadavre de leur enfant, entièrement recouvert de plumes blanches.

Et, dans le ciel, au-dessus de la maison, un condor décrivait d’immenses cercles, en pleurant la mort de sa femme bien-aimée et en criant :

- Rendez-moi mon épouse, rendez-moi mon épouse !

 

Source :

Les Indiens de la Cordillère des Andes

Chapitre cinquième, « Légendes indiennes de la cordillère »

Jean-Christian Spahni

 

 

Tiens, Goupil qui semblerait avoir rejoint le « bon » camp ? et semblant n’être qu’un personnage de second plan ??? ou est-ce simplement parce que maintenant les Indiens dissimulent plus les méfaits de Renard ? Voyons cette affaire-là ensemble !

 

A la première lecture nous voyons quoi ? Une belle histoire d’amour suivie de la révélation concernant la véritable identité de Condor (cet oiseau sacré), le mariage, l’usure de l’amour à cause du temps, le renard qui rend service à l’épouse et va chercher de l’aide, les hommes qui viennent libérer l’épouse, la transformation de l’épouse en condor puis sa mort et la grande tristesse de Condor. Résumer ainsi, nous pouvons penser que Renard s’est racheté une conduite et qu’on peut lui demander de l’aide en toute confiance… mais est-ce réellement la signification de cette légende ? Regardons d’un peu plus près l’entrée de Renard dans la légende, ses actes…

 

Il arrive dans la vie du couple au moment où celui-ci s’essouffle… au moment où l’épouse, éloignée des siens, a le mal du pays et pense souvent à ceux qu’elle a laissé… La légende indique qu’elle n’a pas renseigné Renard sur son état (quand Renard lui pose la question, elle répond qu’elle le lui racontera plus tard). Renard est donc parti chez les parents de celle-ci, sans aucune information sur le comment du pourquoi leur fille chérie s’est retrouvée dans cette caverne. Pourtant Renard leur transmet le message comme quoi il faut aller libérer leur fille (comme si elle était captive du Condor, son mari qui l’adore et qu’elle aime aussi vu qu’elle se transforme en condor peu à peu à la fin)…

 

Dans cette dernière légende retraçant les aventures de Goupil, nous avons l’image d’un renard qui se mêle des affaires des autres et qui, par son manque d’information, peut amener des désastres pour ceux dont il a choisi de s’occuper (la mort de l’épouse à la fin). Bon, d’accord, nous pourrions dire que cette fois-ci Renard peut être considéré comme étant innocent dans le malheur qui frappe cette pauvre famille (les parents et l’époux), car elle illustre plus la dangerosité de se mêler de la vie d’un couple plus que de montrer le caractère de Goupil, cet animal qui est conscient que la population ne l’aime pas… bref, il semblerait que dans cette légende, renard soit montré comme « gaffeur » car s’il avait dit « chercher votre fille » plutôt que « votre fille est prisonnière », les parents n’auraient pas tenté de cacher leur fille au Condor en pensant la protéger, et celui-ci aurait pu ainsi la sauver d’une mort certaine. Rappelez-vous, à partir du moment où la jeune fille arrive dans la caverne elle ne s’alimente plus avec des légumes et des fruits (comme elle le faisait chez ses parents) mais exclusivement de viande que le condor lui rapporte (qui est l’image d’une épouse si amoureuse qu’elle a besoin de son époux pour vivre et si elle se retrouve séparer de lui, elle meurt).

 

Bref, cette légende montre qu’il faut se méfier des propos de Renard et de ses bonnes intentions, car, même s’ils semblent révéler la vérité, les informations transmises par renard peuvent être erronées car renard ne se renseigne pas suffisamment et se trompe quand il s’agit d’interpréter des faits… elle montre aussi que les indiens, malgré la tentative de changer de renard, estiment toujours qu’il n’est qu’un parfait idiot…

 

Ah ! Maître Goupil ! décidemment tu ne t’es pas amélioré pendant la traversée ;)… tu es toujours bien tel que nous, sur le vieux continent, te connaissons ;)…

 

Bisous,

@+

Sab

 

Pour info : il reste encore une légende indienne (non de Goupil) à vous faire connaître avant que vous ne puissiez dire que vous connaissez toutes les légendes de cette culture qui se trouvent dans ma bibliothèque…

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